Finance durable : l’indice Vérité40 d’Axylia devient un produit investissable avec Natixis

Responsabilité sociale - Que deviendrait la valeur financière des entreprises françaises, si elles devaient payer la facture de leurs émissions de carbone ? Ce mardi 27 juin, Axylia dévoile la 3e édition de son indice Vérité40. L'outil devient un produit financier investissable — le certificat Natixis Vérité 40. Le point du Courrier Financier — avec les réponses exclusives de Vincent Auriac, président d'Axylia.

Le carbone, mais qui paiera la facture ? Ce mardi 27 juin, Axylia — cabinet de conseil, spécialisé en finance responsable — dévoilait la troisième édition de l’indice Vérité40. Objectif, lister les 40 entreprises françaises actuellement en mesure de payer leur facture carbone, à partir de leur rentabilité d’exploitation. Pour y parvenir, Axylia s’est appuyée sur son outil d’analyse : le Score Carbone. « Axylia a développé une méthodologie simple qui permet aux émetteurs comme aux investisseurs de calculer une vraie valeur financière couvrant les dommages du CO2 sur l’environnement », explique Vincent Auriac, président d’Axylia.

En 2023, l’indice Vérité40 devient un produit financier investissable, le certificat Natixis Vérité 40. Ce titre de créance est accessible à partir de 1 000 euros, pour un horizon d’investissement recommandé de 10 ans (risque de perte en capital, en cours de vie et à l’échéance). Objectif de ce nouveau produit financier, aider les investisseurs à « aligner leurs placements sur le plus grand défi des années à venir », indique Axylia. L’indice Vérité40 affiche 38,6 % de performance cumulée sur 3 ans — ce qui correspond à une performance annualisée de 9,6 %.

Finance durable : l'indice Vérité40 d'Axylia devient un produit financier avec Natixis
Palmarès 2023 de l’indice Vérité40
Source : Axylia

D’après Axylia, la facture carbone du Vérité40 est aujourd’hui quatre fois inférieure à celle de la Bourse de Paris. En moyenne, les 40 plus grandes capitalisations boursières françaises obtiennent en moyenne la note de D. Si l’intégralité des émissions de CO2 de ces sociétés étaient converties en euros, la majorité d’entre elles ne pourraient pas payer.

Comprendre la méthodologie de l’indice

Comment Axylia procède-t-elle ? Les émissions de CO2 (scope 1 à 3) de l’année 2022 sont indiquées dans les rapports financiers des sociétés. Axylia accorde une attention particulière au scope 3, qui représente en moyenne 80 % des émissions d’une entreprise. Les tonnes de CO2 émises sont ensuite multipliées par le coût de la tonne de carbone, selon les évaluations du GIEC — actuellement, il coûte 127 euros la tonne — pour obtenir la facture carbone. Cette facture carbone est ensuite déduite du résultat d’exploitation (EBITDA) de l’entreprise pour obtenir l’EBITDA « ajusté du carbone ».

La facture carbone est rapportée à l’EBITDA afin d’en déduire le risque carbone de l’entreprise. Ce risque carbone est ensuite converti en Score Carbone Axylia (sur une échelle de A à F). Plus le risque est faible, plus le Score Carbone se rapproche de A. Pour la troisième édition de l’indice Vérité40, Axylia a passé au crible les 120 premières capitalisations boursières françaises. L’indice conserve les entreprises dont le Score Carbone reste positif (note A, B ou C) et celles qui engagent le plus d’efforts pour obtenir un Score Carbone positif d’ici 2030. Les entreprises dont les scores s’affichent à D,E,F et ND (non déclaré) sont écartés de l’indice.

Source : Axylia

3 questions à… Vincent Auriac, président d’Axylia

Le Courrier Financier : Chez Axylia, pourquoi avez-vous choisi de mesurer l’EBITDA ajusté du carbone pour évaluer les entreprises ?

Vincent Auriac : Nous dialoguons beaucoup avec nos clients. Il y a 4 ans, l’un d’eux nous a demandé d’exclure les opérateurs de maisons de retraite de son portefeuille financier. C’est sans surprise, quand nous savons qu’il s’agit d’une association qui envoie des bénévoles au domicile des personnes âgées, afin qu’elles y finissent leurs vieux jours.

Finance durable : l'indice Vérité40 d'Axylia devient un produit financier avec Natixis
Vincent Auriac

Nous avons rencontré leurs gestionnaires des fonds ISR qui en détenaient. Tous nous ont indiqué que les notes ESG étaient bonnes, que les scores de controverses étaient bas et qu’ils ne voyaient pas de raison de sortir de ces opérateurs. Le client a donc vendu tous ces fonds. Nous avons relevé le défi et inventé de toutes pièces une nouvelle approche.

Afin de sortir de l’opacité, nous avons décidé d’écarter d’office l’idée d’une énième notation ESG. Nous voulions une approche simple, opposable et transparente. Nous souhaitions identifier les entreprises les plus résistantes face à une tarification du carbone. Nous avons réfléchi à une facture carbone qui monétise les émissions de CO2.

Nous faisons de l’intégration ESG au sens premier du terme, en déduisant cette facture carbone de l’EBITDA puisque le sens d’une facture est d’être payée. Plus largement, il faut de nouveaux indicateurs de richesse qui tiennent compte des impacts négatifs sur la société. Le temps est venu de compter ce qui compte vraiment.

C.F. : En 2023, l’Indice Vérité40 devient un produit financier investissable. Comment les CGP peuvent-ils s’en servir dans leurs allocations de portefeuille ? 

V.A. : Fin décembre 2022, nous avons franchi l’étape de faire de l’indice un produit financier indiciel. Il prend la forme d’un AMC (actively managed certificate), un certficat boursier en français. C’est une solution très utilisée en Suisse au sein de l’univers des Familly Offices. Le certificat vient de recevoir le Prix Spécial de l’Innovation de l’AGEFI. Concrètement, c’est une obligation émise par Natixis indexée sur la performance du panier des 40 valeurs du Vérité 40.

Le Score Carbone du certificat atteint la note A, contre D pour le CAC40 (sur une échelle de A à F). Il affiche une personnalité marquée : par la seule et stricte application du Score Carbone, l’absence des producteurs d’énergies fossiles (incapables de payer leur facture carbone) et des banques — car elles ne publient pas leur scope 3, qui représente 93 % de leurs émissions.

Nous ne revendiquons pas de performance ESG mais nous avons observé que la note ESG du Vérité 40 n’est pas dégradée par rapport à l’indice de la Bourse de Paris : même part de femmes au COMEX, score de controverse plus faible, meilleur profil ESG chez MSCI par exemple. Le certificat bénéficie d’une cotation quotidienne.

C.F. : Comment cet indice va-t-il continuer d’évoluer d’ici 2030 ? Quelle est votre feuille de route ?

V.A. : Nous l’améliorons régulièrement. L’an dernier, nous avons introduit un Score Carbone Dynamique pour récompenser les entreprises qui réalisent les plus gros efforts de décarbonation — c’est la dimension best effort et plus simplement best of). Cette année, nous prenons les chiffres d’émissions de CO2 publiés par les entreprises, tout en exercant des contrôles de cohérence.

Objectif, identifier les sous-estimations notamment dans une perspective sectorielle. Si c’est le cas, nous mettons un Score Carbone « ND » en attendant que l’entreprise précise ses calculs. Cette année aussi, nous ne retenons que les scopes 3 validés par l’initiative SBTI, qui s’adosse à une démarche scientifique.

Nous sommes en cours de déploiement de cet indice dans l’univers des obligations. Nous sommes en cours de finalisation d’un mandat de gestion Score Carbone avec une société de gestion spécialisée. Dans la foulée, une déclinaison au monétaire est prévue de manière à couvrir les trois grandes classes d’actifs.

Le Score Carbone est universel. Nous comptons déjà 15 000 émetteurs sur notre site scorecarbone.fr. Nous sommes ouverts à des partenariats avec des sociétés de gestion pour une déclinaison sur d’autres zones géographiques. 

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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