ESG : les engagements en faveur de la nature commencent à devenir sérieux

Responsabilité sociale - Forêts, océans, climat... En 2023, la protection de la planète arrive en tête des agendas politiques. Comment se traduisent les engagements financiers en faveur de la nature ? Quelles trajectoires se dessinent pour les investissement ESG ? Les explications de Michael Lewis, responsable de la recherche ESG chez DWS.

Les négociations et les réglementations visant à protéger le capital naturel et à inverser la tendance en matière de biodiversité se sont accélérées au cours des derniers mois, de l’Amérique du Sud à la Chine, en passant par l’Union européenne et les États-Unis. Il s’agit notamment du règlement de l’UE sur les produits exempts de déforestation, de la loi sur les marchés publics exempts de déforestation tropicale adoptée par l’assemblée de l’État de New York et du sommet organisé ce mois-ci par huit nations amazoniennes.

Ces initiatives sont les bienvenues car, au cours des cinquante dernières années, un tiers de la couche arable de la planète a été dégradé, 32 % de la superficie forestière mondiale a été détruite et plus de 85 % des zones humides ont été perdues, d’après le Forum économique mondiale (WEF, en anglais). Collectivement, cette perte de nature compromet le rôle essentiel que jouent nos terres et nos océans dans la réduction et l’élimination des émissions.

Terres, mers et appauvrissement de la biodiversité

Selon le WWF, les activités les plus néfastes à l’origine de la perte de biodiversité sont le changement d’utilisation des terres et des mers, la surexploitation des espèces et des ressources, les espèces envahissantes et les maladies, la pollution et le changement climatique.

Compte tenu des règles de gouvernance floues concernant nos océans, les gouvernements ont eu tendance à concentrer leurs efforts sur la terre et plus particulièrement sur la lutte contre la déforestation — qui est fortement concentrée en Amérique du Sud, en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud-Est et en Océanie d’après l’ONU.

Avec près de 60 % de l’Amazonie située au Brésil, l’élection du président Luiz Inácio Lula da Silva au Brésil cette année a fait naître l’espoir d’une volonté politique plus forte de s’attaquer à la déforestation. Toutefois, lors d’une réunion au Brésil ce mois-ci, huit gouvernements amazoniens n’ont toujours pas été en mesure de s’engager collectivement à mettre fin à la déforestation.

Un levier potentiellement plus efficace pourrait donc être l’adoption, dans les pays éloignés des forêts tropicales, de réglementations garantissant que les produits entrant sur leurs marchés ne sont pas issus de la déforestation. C’est la production de produits alimentaires qui est au centre de ces efforts, puisque le secteur agricole est responsable de 90 % de la déforestation.

Consommateurs européens et déforestation

Comme le WWF estime que les consommateurs européens sont responsables de 16 % de la déforestation tropicale via leurs importations de produits agricoles, les décideurs politiques européens ont pris des mesures à travers le règlement sur les produits sans déforestation qui est entré en vigueur en juin 2023.

Les produits de base en première ligne seront ceux qui sont principalement liés à la production de bœuf, de café, de cacao, d’huile de palme, de caoutchouc, de soja et de bois, ainsi que leurs produits dérivés tels que le cuir, les chocolats, les pneus et les meubles. Cela signifie que toute entreprise souhaitant importer ces produits dans l’UE doit s’assurer qu’ils n’ont pas été cultivés dans des zones forestières défrichées après 2020.

Par ailleurs, l’Europe prend également des mesures pour préserver son capital naturel à l’intérieur de ses frontières. La loi européenne sur la restauration de la nature, adoptée par le Parlement européen le mois dernier, vise à restaurer les habitats, à inverser le déclin des pollinisateurs, à restaurer les zones de tourbières asséchées, les herbiers marins et les fonds marins, et à s’engager à planter au moins trois milliards d’arbres supplémentaires dans l’Union européenne d’ici à 2030.

Protéger les océans et leur écosystème

Mais nos océans restent un écosystème oublié lorsqu’il s’agit de leur protection. C’est pourquoi nous appelons les gouvernements à travailler à la mise en place de réglementations visant à interdire le chalutage de fond, l’exploitation minière des fonds marins, la chasse à la baleine, l’ablation des ailerons de requins et à réduire les subventions à la pêche qui ont des effets néfastes. Toutes ces mesures permettraient d’améliorer le rôle de nos océans en tant que régulateurs du climat.

En outre, les investisseurs peuvent jouer un rôle important dans la protection de ces écosystèmes en intégrant les océans dans leurs engagements avec les entreprises dans lesquelles ils investissent. Ils pourraient notamment encourager les entreprises du groupe Ocean 100 à réduire l’utilisation du plastique, à diminuer la pollution de l’eau et à encourager l’adoption de pratiques de pêche durables.

En outre, la promotion de l’économie de l’océan par le biais des principes de financement de l’économie bleue durable, d’objectifs océaniques fondés sur la science et de l’adoption de solutions technologiques marines avancées pourrait ouvrir la voie à un avenir plus durable pour nos océans.

Michael Lewis - DWS

Responsable de la recherche sur la thématique ESG

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