Patrimoine : les Français épargnent par précaution et pour leur retraite

Les Français, plus fourmis que cigales ? Ce lundi 28 mars, Le Cercle de l’Épargne/Amphitéa dévoile son enquête 2022 sur « Les Français, l’épargne et la retraite » — en partenariat avec AG2R La Mondiale. L’enquête Ifop a été menée en février 2022 auprès de 1 007 personnes, représentatives de la population française âgée de 18 ans et plus (méthode des quotas). Entre inflation galopante et conflit russo-ukrainien, sept Français sur dix (72 %) cherchent à anticiper l’avenir. Malgré un niveau de protection sociale élevé, ils épargnent en priorité par précaution (42 %) ou pour leur retraite (30 %). Ce réflexe reste moins ancré pour financer sa voiture (23 %) ou son logement (15 %).

L’épargne concerne toutes les classes sociales. Début 2022 malgré la conjoncture, sept Français sur trois (70 %) parviennent ainsi à épargner tous les mois. D’après l’Insee, le taux d’épargne des ménages français atteignait 17,4 % au T4 2021. En moyenne sur l’année 2021, ce même taux s’est maintenu à un niveau très élevé (19,4 %) — preuve d’un certain attentisme dans les habitudes de consommation des Français. D’après le Baromètre Cercle de l’Epargne/Amphitéa, nos concitoyens agissent en épargnants avisés. « Les Français sont assez mâtures dans leur lecture des produits financiers. Ils ont bien intégré la notion de couple risque/rendement », analyse Bruno Angles, Directeur général délégué d’AG2R La Mondiale.

Qui détrônera l’assurance vie ?

Entre 2017 et 2022, l’assurance vie maintient son attractivité en dépit de la baisse des rendements des fonds euros. Près de six Français sur dix (59 %) y voient un placement intéressant. En 2021, l’assurance vie a signé sa meilleure année depuis dix ans d’après les chiffres de France Assureurs publiés le 3 février dernier. La collecte nette se hisse à +23,7 milliards d’euros. Fin décembre 2021, les encours des contrats d’assurance vie atteignent 1 876 milliards d’euros — soit +4,4 % sur un an. La part des unités de compte (UC) poursuit sa progression (39 % sur l’année). La collecte nette en UC atteint +3,7 milliards d’euros en décembre 2021, son niveau le plus élevé depuis plus de vingt ans.

Détail révélateur, la tranche des 18 à 24 ans « clientèle de l’avenir » participe à la bonne tenue de l’assurance vie. Ils sont 59 % à juger ce placement intéressant. « L’assurance vie confirme sa position de placement tous azimuts, en recueillant un score similaire quel que soit le taux d’épargne parmi ceux qui peuvent mettre de l’argent de côté », affirment les auteurs de l’étude. « L’assurance vie répond aux multiples objectifs des épargnants, tout au long de leur vie », commente pour sa part Franck Le Vallois, directeur général de France Assureurs. L’accord de place en matière de transparence et de lisibilité des frais, présenté par Bercy le 3 février dernier, devrait renforcer l’attractivité de l’assurance vie et du PER.

L’épargne pour préparer sa retraite

Deux Français sur trois (66 %) considèrent que leur pension est ou sera insuffisante pour vivre correctement à la retraite. Cette inquiétude atteint davantage les actifs (72 %) que les retraités (51 %). Si ce ressenti a été renforcé par le débat sur la réforme des retraites en 2019, il ne reflète pas nécessairement la réalité. En 2018, selon l’enquête Revenus fiscaux et sociaux de l’Insee, le niveau de vie médian des retraités en France métropolitaine vivant à domicile (hors institutions, type maison de retraite ou EHPAD) s’élevait à 1 850 euros par mois. Un chiffre 4,6 % supérieur au niveau de vie médian de l’ensemble de la population française, qui atteignait à cette date 1 770 euros par mois.

Le sentiment de disposer d’une pension insuffisante reste lié au niveau de revenu. Seuls 20 % des Français qui touchent des revenus modestes — moins de 1 200 euros nets par mois — estiment que leur pension de retraite sera suffisante. Par opposition, 57 % des Français qui gagnent plus de 4 000 euros nets mensuels par mois partagent la même opinion. En 2022 avec la normalisation de la crise sanitaire, la proportion de personnes qui épargnent pour la retraite remonte, alors qu’elle baissait depuis deux ans. Un Français sur deux (52 %) épargne aujourd’hui pour sa retraite. Mais en-dessous de 2 000 euros nets de revenus mensuels, la majorité des sondés (plus d’un sur deux) n’épargne pas.

Comment accompagner et conseiller ?

C’est un paradoxe, l’épargne retraite sera d’autant plus répandue que le niveau de revenu sera élevé. « Ceux qui épargnent pour leur retraite ne sont pas ceux qui en auront le plus besoin », déplore Jérôme Jaffré,  Directeur du Centre d’Études et de Connaissances sur l’Opinion Publique (CECOP). 70 % de ceux qui pensent que leur pension sera « tout à fait insuffisante » pour vivre correctement à la retraite n’épargnent pas. En revanche, 68 % de ceux qui la voient comme « suffisante » épargnent régulièrement, ou quand ils le peuvent. « Il y a là un hiatus et potentiellement une fragilité sociale accrue », pointe le baromètre. Pourtant, l’appétence des Français pour l’épargne ne se dément pas.

Les Français ont une vision nette de la rentabilité et des risques associés. Face à la baisse du rendement des produits de taux (livret A et contrats d’assurance vie en euros), les Français sont de plus en plus nombreux à estimer que l’avenir de l’épargne passe par des produits plus risqués. Derrière l’immobilier locatif (76 %) — « Nous sommes en France, l’amour des Français pour la pierre n’est un mystère pour personne » s’amuse Jérôme Jaffré — ce sont les actions (74 %) et les bitcoins (57 %) qui arrivent en tête des placements jugés rentables. Sur ces classes d’actifs qu’ils connaissent moins bien, les Français ont besoin de conseil. Un nouveau sillon à creuser pour les conseillers en gestion de patrimoine (CGP).