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La crise sanitaire n’a pas entamé le patrimoine financier des Français. En 2020, la fortune nette par adulte a progressé de +5,9 % en France — un chiffre qui monte à +6,9 % pour la fortune nette — d’après Credit Suisse. Ce mardi 22 juin, le groupe publie la 12e édition de son « Global Wealth Report » (en anglais), son rapport annuel sur le patrimoine des ménages à travers le monde. A l’heure où la consommation relance la croissance dans l’Hexagone, il est temps de faire les comptes. Comment la richesse des Français a-t-elle évoluée ? Qu’est-ce qui change avec le Covid-19 ? Tour d’horizon avec Le Courrier Financier.
Hausse des actifs financiers…
Les confinements successifs (de mi-mars à mi-mai puis en novembre) ont rythmé 2020. En conséquence, le PIB en volume a chuté de 8,3 % en France en un an. Les premiers signes de la reprise sont toutefois apparu dès le troisième trimestre de l’année dernière. En 2021, la prévision de croissance est de 5,8 %. Les mesures de chômage partiel et les aides financières de l’Etat ont limité les dégâts sur le front de l’emploi. Le taux de chômage est passé de 8,5 % à 9,1 % entre le début de la pandémie et le T3 2020. Le revenu disponible a augmenté de +0,4 % en moyenne, une hausse qui devrait se poursuivre (+1,6 %) en 2021.
Le recul de la consommation en 2020 (-8,3 %) a certes fait exploser le taux d’épargne, qui atteint 26,8 % en France au T2 2020. Mais « la plus grande part de ces économies supplémentaires devrait être dépensée d’ici fin 2021 », tempère Crédit Suisse. Si les épargnants français se sont enrichis, c’est à travers leurs actifs financiers. La forte chute du T1 2020 — le CAC 40 dévissait de 32,9 % le 20 mars 2020 — a été compensé au second semestre, avec une tendance à la hausse des actions. Les actions françaises n’ont reculé que de -2,8 % en 2020. Sur la période, les placements financiers par adulte en France ont progressé de +14,0 %.
La composition des fortunes varie au rythme des crises. En France, les actifs financiers ont représenté jusqu’à 46,2% de la fortune brute en l’an 2000. Ils ont chuté à 35,2 % en 2007 à cause du renforcement de la performance des actifs non financiers, et de la hausse des prix du logement. Reflet de ce recul, les inégalités de richesse en France ont reculé — l’indice de Gini est ainsi passé 69,7 à 67,7 entre 2000 et 2007. Mais depuis la crise des subprimes en 2008, la tendance s’est inversée. Aujourd’hui, les actifs financiers représentent 43,5 % de la fortune brute des Français, en deçà du niveau de l’an 2000… pour le moment.
…un trompe-l’œil économique ?
Les politiques de soutien monétaire adoptées en urgence par les banques centrales — BCE et Fed en tête — ont modéré l’impact à court terme de la pandémie sur les marchés financiers. Mais « c’est la baisse des taux d’intérêt par les banques centrales qui a probablement eu le plus grand impact. Elle est l’un des principaux facteurs sous-jacents à l’essor des cours des actions et des prix de l’immobilier, et ceux-ci se répercutent directement sur nos valorisations de la richesse des ménages », analyse Nannette Hechler-Fayd’herbe, CIO International Wealth Management et Global Head Economics & Research chez Credit Suisse.
Quand cette perfusion sera retirée, les marchés risquent le contrecoup — le changement de ton de la Fed début juin en donne déjà un avant-goût. « La création de richesses en 2020 semble avoir été entièrement dissociée des difficultés économiques entraînées par le Covid-19. Si l’on ne tient pas compte des hausses des prix des actifs, il est fort probable que la fortune mondiale des ménages ait diminué. Dans les tranches de fortune plus faibles, au sein desquelles les placements financiers sont moins présents, la richesse a eu tendance à stagner ou, dans de nombreux cas, à régresser », prévient Anthony Shorrocks, économiste et auteur du rapport.
La richesse des ménages a progressé dans le monde en 2020, mais les écarts se sont nettement creusés. La part des grandes fortunes a augmenté, « bien que le rebond post-2007 n’ait pas été aussi fort que pour l’indice de Gini ». En France, la part de la richesse des 1 % est repassé de 20,3 % à 22,1% entre 2007 et 2020. Les mesures des gouvernements et des banques centrales « ont permis d’éviter une crise mondiale de grande ampleur » souligne Nannette Hechler-Fayd’herbe, mais au prix d’un endettement considérable (+20 % à l’échelle mondiale). Reste à savoir quelle sera leur marge de manœuvre dans les cinq ans à venir.
