BCE : hausse des taux, quel impact sur l’immobilier ? — 3 questions à… Jérémy Schorr, directeur commercial chez Primaliance et bienprévoir.fr

Immobilier - Cette semaine, la Banque centrale européenne (BCE) annonce une nouvelle hausse de ses taux directeurs. Quel impact sur l'investissement immobilier ? Jérémy Schorr, directeur commercial de Primaliance et bienprévoir.fr, répond en exclusivité aux questions du Courrier Financier.

Toujours plus haut. Ce jeudi 14 septembre, la Banque centrale européenne (BCE) a relevé de 0,25 point de pourcentage ses taux directeurs. Objectif, combattre l’inflation qui atteignait 5,3 % dans la zone euro en août 2023, d’après eurostat. Il s’agit de la dixième hausse de taux d’affilée dans le cadre de sa politique de resserrement monétaire. Quel impact sur le secteur du crédit immobilier ? Comment adapter sa stratégie d’investissement immobilier, notamment sur le marché des SCPI ? Jérémy Schorr, directeur commercial de Primaliance et bienprévoir.fr, répond en exclusivité au Courrier Financier.

Le Courrier Financier : Ce jeudi 14 septembre, la Banque centrale européenne (BCE) annonce une hausse de +0,25 % de son taux directeur. Ce nouveau resserrement monétaire pourrait-il être le dernier ?

BCE : hausse des taux, quel impact sur l'immobilier ? — 3 questions à... Jérémy Schorr, directeur commercial chez Primaliance et bienprévoir.fr
Jérémy Schorr

Jérémy Schorr : Christine Lagarde a été claire à ce sujet lors de la conférence de presse de la BCE hier. Les 9 précédentes hausses de taux directeurs opérées depuis juillet 2022 ont été vigoureusement transmises à l’économie de la zone euro, les conditions de financement s’étant considérablement resserrées et la demande subissant de ce fait un freinage de plus en plus fort. Cela signifie que la lutte contre l’inflation commence à avoir de vrais effets, avec des perspectives de croissance économique revues à la baisse.

En annonçant cette 10ème hausse des taux hier, alors que certains observateurs s’attendaient à un statut quo, la présidente de la BCE a parallèlement laissé entrevoir une possibilité de pause dans le cycle de resserrement monétaire, les taux actuels ayant probablement atteint des niveaux qui — s’ils sont maintenus suffisamment longtemps — devraient permettre de ramener assez rapidement l’inflation sur l’objectif de l’institut monétaire (2 % à moyen terme).

C.F. : Comment cette décision va-t-elle influencer l’accès des Français au crédit immobilier ? Quel sera l’impact sur le marché des SCPI ?

J.S. : Les marchés ont très bien réagi aux annonces de la BCE du 14 septembre, ce qui signifie qu’un consensus se crée autour de l’idée que la bataille contre l’inflation va être gagnée par la banque centrale en évitant une récession économique trop profonde. Nous avons vu en particulier s’amorcer une baisse des taux longs et une baisse de l’euro contre le dollar.

L’économie américaine semble résister beaucoup mieux que l’économie européenne à la potion amère de la FED, ce qui complique le travail de lutte contre l’inflation outre-Atlantique (la FED a déjà opéré 11 hausses de taux depuis mars 2022 et une douzième hausse n’est pas exclue le 20 septembre). Dans la zone euro, certains pays comme l’Allemagne sont déjà en quasi-récession, en particulier à cause des prix élevés de l’énergie.

La BCE pourrait donc être aidée par la conjoncture économique défavorable. Mécaniquement, la stabilisation des taux longs mettra un coup d’arrêt à la hausse des taux de crédit immobilier et donnera une meilleure visibilité aux banques qui prêteront donc plus facilement. Sur les SCPI, le niveau actuel des taux monétaires (4 %) devient problématique pour les fonds les moins rentables (ceux qui distribuent moins de 4 %). En revanche, les jeunes SCPI qui sont au-dessus de 6 % de taux de distribution gardent un avantage concurrentiel significatif et devraient continuer à collecter.

C.F. : Dans ce contexte, quel conseil donneriez-vous aux épargnants qui souhaitent adapter leur stratégie d’investissement ? Comment conjuguer diversification et performance ?

J.S. : La hiérarchie des rendements des différents placements a été complètement chamboulée par l’action des banques centrales depuis plus d’un an. Nous sommes passés assez brutalement d’un univers de taux zéro (voire négatifs) à un environnement où le taux sans risque est à 4 %. Cela signifie que vous pouvez désormais placer votre argent en SICAV monétaires ou en comptes à terme à 4 %. Les placements traditionnels comme les SCPI qui donnaient environ du 4,5 % depuis plusieurs années (très attractif en période de taux zéro) doivent s’ajuster.

Le nouveau benchmark sur la pierre papier doit être au moins à 6 % pour attirer les épargnants, ce que délivrent d’ailleurs largement les véhicules les plus récents qui achètent aujourd’hui des actifs immobiliers tertiaires européens à 8 % voire 10 % de rendement grâce à leur collecte dynamique. Sur les fonds euros d’assurance vie, nous allons aussi avoir certains supports qui seront à la peine, parce que plombés par leurs souches obligataires achetées à des taux très bas depuis 5 ou 6 ans.

Enfin, concernant les marchés actions, qui sont aujourd’hui assez chers, attention à leur vulnérabilité à la croissance économique dont les perspectives pour 2023, 2024 et 2025 ont été sensiblement revues à la baisse hier par la BCE. Il faut donc plus que jamais diversifier ses placements, profiter des taux monétaires élevés et ne pas hésiter à saisir les opportunités qui se présentent actuellement sur les jeunes SCPI à fort rendement.

Le crowdfunding immobilier se révèle également particulièrement attractif avec des rendements supérieurs à 10 % généralement sur une période courte (12-36 mois) et se veut très accessible ce qui permet de diversifier ces placements afin de mutualiser les risques.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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