Marchés obligataires : bientôt un pic des taux allemands ?

Asset Management - L'assouplissement des données sur les services et la réduction des besoins de financement des gouvernements pourraient conduire la Banque centrale européenne (BCE) à adopter une politique « dovish ». Le point avec Patrick Barbe, Head of European Investment Grade Fixed Income chez Neuberger Berman.

La dernière baisse des marchés obligataires a commencé à la mi-septembre, poussant le taux allemand à 10 ans à près de 3 %. Cependant, cette tendance s’est inversée fin octobre, ramenant le taux à 2,6 %. Par ailleurs, la dernière réunion de la Banque centrale européenne (BCE) a laissé entrevoir la potentielle fin de son cycle de resserrement.

Le marché semble croire que les taux des obligations en euros ont probablement atteint leur pic et qu’ils pourraient même baisser l’année prochaine. Les principaux moteurs de la hausse des rendements du marché sont la résilience économique et les besoins importants de financement des gouvernements, qui commencent tous deux à s’atténuer.

Resserrement monétaire européen

L’effondrement des obligations en euros en septembre s’est produit aux États-Unis, où la croissance économique était vigoureuse malgré la faiblesse des indicateurs avancés et de confiance. De même, dans la zone euro, les indicateurs prospectifs ont fait craindre une récession majeure, bien que les chiffres économiques actuels ne reflètent qu’une récession technique. Cette dernière est largement due à la résistance du secteur des services, soutenue par le tourisme estival et l’épargne des ménages pendant la période Covid.

Cependant, ces effets s’ont en train de s’estomper, les dernières données concrètes indiquant une détérioration de l’activité des services dans un contexte de resserrement des conditions de crédit. Par conséquent, le marché semble devenir moins confiant au sujet d’une faible reprise économique en début d’année prochaine, ce qui soulève la question : la BCE n’a-t-elle pas réagi de manière excessive dans le cadre de sa politique monétaire « hawkish » ? Et devra-t-elle bientôt commencer à réduire ses taux d’intérêt ?

A court terme, les tensions sur les taux ont été amplifiées par un marché primaire très actif à l’approche de la fin de l’année. La prolongation des aides publiques mises en place pour lutter contre les conséquences de la pandémie, puis la crise énergétique de l’an dernier ont entraîné une hausse des besoins de financement. 

Vers la fin de la hausse des taux ?

Toutefois, la fin de ces crises a incité la plupart des gouvernements à commencer à réduire leurs dépenses, un mouvement qui s’inscrit dans le cadre de la réduction de plus de 50 milliards d’euros des émissions de dette publique brutes (ou 150 milliards d’euros d’émissions nettes) à horizon 2024.

Le marché craignait que cette réduction soit plus que compensée par l’accélération du resserrement quantitatif de la BCE, mais lors de sa dernière réunion, cet élément n’a même pas été évoqué, repoussant probablement ce risque au second semestre 2024. Selon nous, la fin potentielle de la hausse des taux allemands est en vue.

Elle devrait potentiellement se stabiliser entre 2,5 % et 2,75 %. Cependant, toute baisse pourrait être entravée par l’aplatissement actuel de la courbe des taux. Au fil du temps, le moteur de la baisse des taux allemands sera probablement la trajectoire de l’inflation de base de la zone euro. Si elle tombe en dessous de 4 %, cela devrait conduire à une politique plus « dovish » de la part de la BCE.

Patrick Barbe - Neuberger Berman

Head of European Investment Grade Fixed Income ; Gérant senior

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