Faillite de SVB — 3 questions à… Timothée Waxin, Responsable du département Finance, Data & Performance d’EMLV

Asset Management - Après la faillite de la Silicon Valley Bank (SVB) aux Etats-Unis, la panique s'est emparée des marchés financiers. Le secteur bancaire européen doit-il craindre la contagion ? Timothée Waxin, Responsable du département Finance, Data & Performance d'EMLV répond aux questions du Courrier Financier.

C’est la faillite bancaire inattendue la plus importante depuis 2008. Aux Etats-Unis, la Silicon Valley Bank (SVB) a déposé le bilan, ce vendredi 10 mars. De quoi déclencher un repli des actions du secteur bancaire des deux côtés de l’Atlantique, ainsi qu’une hausse des primes de risque associées à ces émetteurs sur les marchés obligataires. Faut-il désormais craindre un risque systémique pour les banques ? Timothée Waxin, Responsable du département Finance, Data & Performance à l’Ecole de Commerce et de Management à Paris (EMLV) répond en exclusivité aux questions du Courrier Financier.

Le Courrier Financier : Ce vendredi 10 mars, la Silicon Valley Bank (SVB) a fait faillite. Comment expliquer cette défaillance ?

Faillite de SVB — 3 questions à... Timothée Waxin, Responsable du département Finance, Data & Performance d'EMLV
Timothée Waxin

Timothée Waxin : SVB a décidé de céder la semaine dernière sur le marché la quasi-totalité de son portefeuille comptabilisé en available-for-sale (AFS), représentant 21 milliards de dollars. Cette cession a généré une moins-value de 1,8 milliard de dollars que la banque a voulu compenser par une augmentation de capital de 2,25 milliards de dollars.

Cette augmentation de capital a été rendue difficile par la forte chute du cours de l’action et sa suspension de cotation. La banque a donc été placée sous le contrôle de la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) [NDLR cette agence indépendante du gouvernement des États-Unis garantit les dépôts bancaires faits aux États-Unis jusqu’à 250 000 dollars].

Comment les autorités américaines ont-elles réagi ? Leurs mesures peuvent-elles éviter un bank run ?

T.W. : Dimanche 12 mars, la FDIC et la Réserve fédérale américaine (Fed) ont annoncé que toutes les catégories de déposants pourraient récupérer leur argent et en totalité. Il s’agit d’une décision exceptionnelle. La Fed a lancé le Bank Terme Funding Program, une nouvelle facilité de prêt d’un an pour les banques contre toute une gamme de titres tels que les US Treasuries et les Agencies MBS.

Le système bancaire français est-il à l’abri de la contagion ? Qu’est-ce qui différencie la situation actuelle de la crise financière de 2008 ?

T.W. : Il n’y a pas d’alerte spécifique en France. Les banques françaises ne sont pas exposées à un seul secteur. Leur modèle de banque universelle les protège. Le cadre réglementaire et prudentiel post-crise financière de 2007-2008 avec l’accord de Bâle III et la mise en place de l’union bancaire rend les secteurs bancaires européen et français bien plus solides.

À fin 2021, le ratio Common Equity Tier 1 des six grandes banques françaises s’élève à 15,5 %, contre 5,8 % en 2008. Les banques françaises ont des ratios de liquidité élevés — ratios de liquidité court terme Liquidity Coverage Ratio de 153,8 % et de liquidité long terme Net Stable Funding Ratio de 121,1 % à fin 2021 d’après les chiffres de l’ACPR.

Les comparaisons avec la crise financière de 2008 ne sont pas appropriées. Les banques de taille systémique sont globalement bien protégées contre le risque de taux. Les banques françaises sont solides : il n’y a pas d’exposition directe des banques françaises sur SVB. En outre, les banques régionales américaines ne sont pas au cœur du système financier comme Lehman Brothers pouvait l’être.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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