BCE : hausse des taux et marchés obligataires — 3 questions à… Konstantin Veit, gérant de portefeuille chez PIMCO

Actualités - Cette semaine, la Banque centrale européenne (BCE) annonce une nouvelle hausse de ses taux directeurs. Quel impact sur l'obligataire ? Comment adapter sa stratégie d'investissement ? Konstantin Veit, gérant de portefeuille chez PIMCO, répond en exclusivité aux questions du Courrier Financier.

En route vers la normalisation de l’inflation ? Ce jeudi 14 septembre, la Banque centrale européenne (BCE) se réunissait à Francfort. L’institution a annoncé une nouvelle hausse de ses taux directeurs (+0,25 point de pourcentage). Objectif, lutter contre l’inflation dans la zone euro (5,3 % en août 2023) et la ramener à son objectif de 2 %. « Bien qu’elle puisse encore augmenter les taux d’intérêt, la BCE a potentiellement atteint son rythme de croisière », réagit Konstantin Veit, gérant de portefeuille chez PIMCO, à l’issue de la réunion de la BCE. Pour aller plus loin, il répond en exclusivité aux questions du Courrier Financier.

Le Courrier Financier : Ce jeudi 14 septembre, la Banque centrale européenne (BCE) a annoncé une nouvelle hausse de taux de 0,25 point de pourcentage. Pourquoi pensez-vous que l’institution a atteint « son rythme de croisière » ?  

BCE : hausse des taux et marchés obligataires — 3 questions à… Konstantin Veit, gérant de portefeuille chez PIMCO
Konstantin Veit

Konstantin Veit : Alors que cette hausse des taux pourrait ne pas être la dernière, l’attention se porte désormais sur la durée pendant laquelle les taux resteront à ce sommet. Bien que le taux final actuellement fixé par les marchés financiers nous semble raisonnable, nous restons sceptiques quant à la possibilité que la BCE procède à des réductions de taux rapidement, compte tenu de la persistance de la dynamique de l’inflation.

En outre, les perspectives de croissance à court terme pour la zone euro se sont considérablement détériorées. La forte baisse de l’indice des directeurs d’achat (PMI) pour la zone euro suggère que l’économie est sur le point de connaître une légère récession : l’indice PMI composite est tombé à 46,7 en août, ce qui correspond historiquement à une légère contraction du PIB d’environ -1 % sur une base annuelle.

Si le marché du travail reste tendu, il montre également des signes précoces d’affaiblissement, car la croissance de l’emploi s’est ralentie et les indicateurs prospectifs laissent présager un nouvel infléchissement. En outre, certains indicateurs salariaux suggèrent que les pressions salariales commencent à s’atténuer à mesure que l’inflation globale diminue. Ainsi, un nouveau ralentissement économique pourrait-il contribuer à ramener l’inflation au niveau ciblé.

C.F. : La BCE pourrait réduire son bilan plus rapidement que prévu. Quelles seraient les conséquences sur les marchés ? Comment les investisseurs peuvent-ils adapter leurs stratégies obligataires ? 

K.V. : La BCE a maintenu ses orientations en matière de bilan lors de la réunion de septembre et a toujours l’intention de réinvestir les échéances du PEPP au moins jusqu’à la fin de l’année 2024. Les réinvestissements flexibles du PEPP restent la première ligne de défense contre le risque de fragmentation, c’est-à-dire la possibilité que les rendements des différents emprunts souverains de la zone euro changent ou réagissent différemment à la politique de la BCE, ce qui peut déstabiliser les marchés. Cependant, nous pensons que la BCE vise une réduction plus rapide des réinvestissements PEPP, potentiellement dès cette année.

C.F. : Dans ses projections, la BCE prévoit le retour de l’inflation à 2,1 % en 2025 — un chiffre proche de l’objectif de 2 %. Sous quelles conditions cet objectif est-il atteignable, selon vous ?

K.V. : La trajectoire de l’inflation reste incertaine. Si la dynamique économique de la zone euro s’est sensiblement affaiblie, les marchés du travail restent solides et l’inflation sous-jacente semble bien orientée. Les nouvelles projections des services de la BCE font état d’une croissance à court terme nettement plus faible que prévu, mais d’une inflation toujours supérieure à l’objectif en 2025, à savoir 2,1 %.

Selon Eurostat, l’inflation globale et l’inflation de base de la zone euro se sont élevées à 5,3 % en août. Si l’inflation globale a diminué de moitié depuis le pic atteint en 2022, les pressions sous-jacentes sur les prix restent résolument élevées, principalement en raison de facteurs locaux. Pour que l’inflation revienne à l’objectif de 2 % de la BCE, un nouvel affaiblissement du marché du travail et de l’économie dans son ensemble peut être nécessaire. 

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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