Les marchés en apnée avant la réunion de la Fed

Asset Management - Ce mercredi, la Federal Reserve devrait annoncer une nouvelle hausse des taux directeurs. Comment les marchés anticipent cet évènement ? L'analyse de Xavier Chapard, Recherche & Stratégie chez La Banque Postale Asset Management (LBP AM).

Les marchés actions sont en baisse de 10% depuis leurs points hauts de mi-août et les taux d’intérêts ont dépassé leurs points hauts de mi-juin des deux côtés de l’atlantique et atteignent des plus hauts depuis plus d’une décennie en anticipation d’une nouvelle hausse massive des taux de la Fed ce soir.

Des hausses de taux en série

La Fed devrait remonter son taux directeur de 75pb pour la troisième réunion consécutive, à 3,25% et une hausse de 100pb est même possible. De plus, Jerome Powell devrait continuer d’indiquer que la Fed maintiendra les taux plus élevés plus longtemps. Cette vue devrait d’ailleurs être confirmée par les nouvelles projections de taux directeur des membres de la Fed (le fameux dot-plot), qui devraient indiquer un taux directeur plus élevé pour 2022 et 2023 et qui pourraient rester nettement au-dessus de son niveau neutre en 2024 et 2025.

Comme les marchés anticipent déjà une Fed agressive, un rebond après la réunion de ce mercredi ne nous surprendrait pas. Mais au-delà, nous pensons que la prudence reste de mise car le « pivot » vers une politique monétaire moins agressive qu’attend nombre de traders n’est clairement pas (encore) à l’ordre du jour même si les perspectives économiques se dégradent.

En attendant la Fed, la Riksbank (banque centrale de Suède) a débuté la semaine des banques centrales avec une hausse massive de 100pb, une première depuis 30. Après la Fed, la Banque d’Angleterre pourrait encore accélérer ses hausses de taux avec une hausse de 75pb possible après la hausse de 50pb en aout. La Banque du Japon devrait au contraire maintenir sa politique monétaire accommodante demain, même si la pression augmente pour qu’elle mène une politique monétaire moins déconnectée du reste du monde car le Yen est à un plus bas depuis 25 ans.

L’Europe face à la crise énergétique

La crise énergétique en Europe reste intense avec des prix du gaz qui restent très élevés (à 200 EUR/MWH) et volatiles. Et il y a peu de chance d’accalmie sur ce front après l’avancée des troupes ukrainiennes et alors que la Russie prépare l’organisation de « référundum » d’annexion dans certains territoires occupés. Le coût de la crise pour la zone euro se voit clairement dans les comptes extérieurs. La balance courante a chuté à -20 milliards d’euros en juillet, un plus bas depuis 2008.

Au total, la facture des importations d’énergie nettes pour la zone euro devrait augmenter de l’ordre de 2,5% PIB en 2022 selon nos estimations. C’est un choc massif pour les revenus en Europe. Il va toutefois être en partie absorbé par les gouvernements qui continuent d’annoncer de plus en plus de soutiens budgétaires (France, Italie, Allemagne…). Au total, nous continuons de penser que l’Europe va souffrir d’une récession « seulement » limitée fin 2022/début 2023, tout du moins si des rationnements importants sont évités et que le resserrement monétaire de la BCE n’entraîne pas de stress financier majeur.