EXCLUSIF / Industrialisation et proximité : clé du succès des acteurs financiers de demain ?

Patrimoine - Banques, assurances, acteurs financiers... Les Français confient toujours leur épargnes aux structures financières traditionnelles. Quelle place les fintechs peuvent-elles prendre sur le long terme ? Quel business model garantira leur croissance ? L'éclairage de Thomas Perret, fondateur de Mon Petit Placement.

Les banques, assurances et autres acteurs financiers traditionnels collectent encore aujourd’hui la grande majorité de l’épargne des Français, particulièrement sur la cible grand public, et ce malgré l’émergence de nombreuses fintechs durant la dernière décennie. Ce phénomène s’explique notamment par la confiance qui émane de ces structures financières et la proximité clients offerte par l’intermédiaire des conseillers.

Un niveau de proximité que les fintechs — ayant le plus souvent cherché à automatiser leurs process au maximum — n’arrivent pas à retranscrire sur le digital, mais qui, parce qu’il n’offre pas la possibilité d’une réelle scalabilité, ne permettra pas aux institutions traditionnelles de maintenir leur niveau de croissance sur le long terme. Alors, entre industrialisation et proximité, à quoi ressemblera le business model des acteurs financiers de demain ?

La finance de demain fera rimer Tech & Humain…

Une grande partie des fintechs nées ces dernières années — à l’instar des plateformes numériques de gestion financière automatisée, appelées robo-advisors — ont cherché à digitaliser à l’extrême l’ensemble de leur parcours clients, notamment via l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA). Des modèles économiques low cost ayant entraîné une déshumanisation de la relation client, et par conséquent un faible niveau de confiance. Or parmi les principaux facteurs clés de succès de tout acteur financier se trouve la proximité et/ou la confiance.

Une proximité, difficilement industrialisable, que ces startups innovantes ont trop souvent oubliée ou laissée de côté, de peur qu’elle ne soit un frein dans leur recherche de rentabilité. S’il est donc essentiel que les fintechs n’aient plus peur d’échanger avec leurs utilisateurs — prenant conscience que ces interactions créeront un modèle vertueux, notamment en termes de communauté — ces dernières doivent néanmoins trouver les outils qui leur permettront d’allier proximité et industrialisation et ainsi de relever le défi de la rentabilité.

Bien qu’un client d’un acteur pure player n’aura jamais réellement l’impression d’être assis dans l’intimité d’un bureau en face de son conseiller, certaines fonctionnalités simples, à l’instar des échanges vidéo ou des chats non automatisés, peuvent faire grandir le sentiment de proximité. Un marketing adapté — via un discours qui interpelle, voire qui tutoie, et/ou via des échanges ludiques étayés de gifs et autres anecdotes amusantes — a vocation à renforcer la relation client en distanciel.

Enfin, utiliser l’IA au service de l’expérience client comporte aussi des avantages, ce à la condition d’éviter les dérives du tout-automatisé pour se concentrer sur l’Humain. Cette technologie peut permettre de détecter les moments opportuns du parcours client où introduire un échange avec un conseiller. Lorsque l’encours de celui-ci a diminué suite à une baisse des marchés ; lorsqu’il se connecte trop régulièrement, preuve d’un certain stress ; lorsqu’il arrive à la fin de son horizon de placement…

Ce fonctionnement donnera aux investisseurs particuliers, souvent non-initiés, le sentiment de pouvoir disposer d’un expert dès lors qu’ils en ont besoin — renforçant ainsi leur confiance.

…mais aussi acteurs traditionnels et startups !

Si les résultats des acteurs financiers traditionnels sont soumis à une inertie importante, bénéficiant tant de nombreux versements réguliers que de fréquents nouveaux clients, ces derniers perçoivent déjà des signaux faibles quant à l’effritement de leur business model, centré sur l’Humain et donc moins rentable. Preuve en est : certaines banques françaises souhaitent désormais faire payer à leurs clients les services d’un conseiller.

Or, c’est pourtant sur cette proximité, force qui leur est inhérente, que les institutions financières doivent capitaliser à l’avenir pour se réinventer et accélérer leur digitalisation. Si la bonne voie semble ainsi se situer à mi-chemin entre acteurs traditionnels et pure player déshumanisés, de plus en plus de partenariats voient le jour entre ces derniers. Un phénomène qui devrait encore s’accentuer à l’avenir : 82% des acteurs traditionnels souhaitent nouer des partenariats avec les fintechs.

Les uns trouvent chez les autres diverses solutions et technologies pour accélérer leur transformation digitale et contribuer à leur modernisation, quand les autres voient dans les premiers des tiers de confiance essentiels à leur bonne relation client. Alors que nous avons très souvent placé en concurrence acteurs traditionnels et nouveaux arrivants digitaux, le maître-mot semble donc aujourd’hui être celui de la collaboration, tant et si bien que leur enjeu commun pour les prochaines années sera de trouver la meilleure synergie possible.

Thomas Perret - Mon Petit Placement

Fondateur

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