Marchés actions : déséquilibres croissants

Asset Management - L'évolution des marchés boursiers repose de plus en plus sur quelques grandes actions. Quels sont les facteurs qui expliquent la diminution de la profondeur du marché ? Les explications de Christian Schmitt, CFA, Senior Portfolio Manager chez Ethenea.

Afin d’éviter les risques ou de saisir les opportunités, nous sommes toujours à l’affût des évolutions divergentes sur les marchés financiers. Dans le cadre de notre analyse des risques et des opportunités, nous cherchons à identifier ces déséquilibres. L’augmentation de ces déséquilibres a été particulièrement frappante ces derniers temps sur les marchés boursiers.

Etats-Unis, l’étroitesse de marché

Aux États-Unis, nous avons pu observer que l’évolution des marchés boursiers n’était plus déterminée que par quelques grandes actions. Ce déséquilibre est facile à constater si nous com le célèbre S&P 500 — pondéré par la capitalisation boursière — avec la variante moins connue de l’indice de référence, avec la même pondération.

Ce dernier évolue autour de zéro depuis le début de l’année, tandis que le S&P 500 a frôlé une hausse à presque deux chiffres. L’action moyenne ne décolle donc pas, alors que le S&P 500 affiche des gains. Ce phénomène est parfois appelé étroitesse de marché.

Le poids du secteur tech

Le poids des cinq plus grandes actions (Apple, Microsoft, Alphabet, Amazon et Nvidia) représente désormais près d’un quart de la capitalisation de l’indice. Apple à elle seule a atteint une capitalisation boursière de plus de 2,5 milliards d’euros, dépassant même légèrement la capitalisation boursière totale du Russell 2000 — un indice boursier de renommée mondiale pour les valeurs secondaires américaines.

Le graphique suivant montre l’évolution imposante de la capitalisation boursière d’Apple et de cet indice, qui comprend environ 2000 valeurs depuis 2010. La capitalisation boursière de l’indice directeur allemand DAX est également représentée à titre de référence complémentaire. Elle s’élevait au total à environ 1,5 milliard d’euros et représentait ainsi environ 60 % de la valorisation boursière absolue d’Apple :

Marchés actions : déséquilibres croissants
« Capitalisation boursière en millions »
Source : Ethenea

Marché moins profond

D’autres exemples de la diminution de la profondeur du marché ont également pour la plupart leur origine aux États-Unis. Par exemple, dans le sillage de la récente crise bancaire, la capitalisation boursière de la plus grande banque américaine, J.P. Morgan, a largement dépassé la capitalisation boursière combinée des 143 banques régionales représentées dans l’indice S&P Regional Banks.

L’évolution de l’action du constructeur automobile américain Tesla par rapport au reste du marché mondial de tous les constructeurs automobiles a également suivi cette tendance au cours des dernières années. Il en va de même, sous une forme modifiée, dans le top 5 des actions du S&P 500 pour Amazon et le fabricant de puces Nvidia, dont la capitalisation boursière représente aujourd’hui environ 30 fois le chiffre d’affaires (et non le bénéfice) de l’année dernière.

Vers plus de déséquilibre ?

Malgré leur connotation tendanciellement négative, les observations décrites restent toutefois ce qu’elles sont en fin de compte : des observations. De petites pièces de puzzle dans le tableau global du marché. L’évolution fondamentale majoritairement très bonne de toutes les actions individuelles mentionnées pourrait tout à fait se poursuivre et les déséquilibres du marché pourraient s’en trouver encore plus accentués.

Ou alors, les secteurs du marché qui étaient jusqu’à présent à l’écart pourraient rattraper leur retard — les valorisations offriraient une marge de manœuvre correspondante — et réduire les déséquilibres en conséquence. Dans tous les cas, il est important de connaître et de suivre de près les évolutions. Pour que nous sachions de quoi nous parlons quand nous allons recommencer à dire « Le marché fait ci ou fait ça ».

Christian Schmitt - Ethenea

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