Etats-Unis : le spectre de la grande crise financière ressurgit

Asset Management - Trois banques américaines viennent de faire faillite aux Etats-Unis. Quel sera l'impact macroéconomique ? Quelles conséquences pour les investisseurs ? Les équipes d’Apicil Asset Management (Apicil AM) publie leur analyse hebdomadaire sur les marchés financiers.

L’actualité des marchés depuis vendredi est dominée par la faillite de trois banques américaines qui sans être des banques de premier plan restent des banques d’importances aux Etats-Unis. La plus importante d’entre elles, la Silicon Valley Bank (SVB), spécialisée dans le prêt aux entreprises de la tech, affichait 210 milliards de dollars de total de bilan ce qui en faisait la seizième banque du pays, et désormais la deuxième plus grande faillite bancaire après Washington Mutual en septembre 2008.

Etats-Unis, des faillites en série

Cette faillite suit celle de Silvergate, une banque spécialisée dans le financement des cryptomonnaies. Ce weekend, une troisième banque, Signature Bank, qui disposait de 110 milliards de dollars de total de bilan a également été placée sous la tutelle de la FED ce dimanche. Ces trois banques ont fait l’objet d’un « bank run » massif qui a conduit à des conséquences en cascades provocant in fine l’insolvabilité de ces institutions financières.

La question que tout le monde se pose ce matin, est-ce grave et est-ce que ces faillites en appellent d’autres ? Si l’histoire ne se reproduit jamais à l’identique, la situation actuelle rappelle certaines caractéristiques de la crise de 2008. La grande crise financière de 2008 trouve son déclencheur dans le cycle de relèvement des taux de la FED débuté en 2004 (les taux fédéraux vont passer de 1 % à 5,25 % en 2 ans) qui a fragilisé les emprunteurs immobiliers américains dont beaucoup n’étaient déjà pas solvables (les fameux subprimes) entraînant la réalisation de pertes gigantesques dans les portefeuilles d’actifs des banques.

Secteurs les plus fragilisés

Le cycle de relèvement actuel des taux débuté en mars 2022, a déjà accumulé 450 points de base de hausse et les marchés s’attendent à 75 bps de hausse supplémentaire d’ici septembre prochain. Ce cycle de relèvement de taux qui est déjà le plus rapide de l’histoire va entraîner des conséquences tant au niveau macroéconomique qu’au niveau des entreprises. Il est probable que les événements de ces derniers jours ne soient le prélude à d’autres difficultés mais, notons-le, dans des secteurs d’activité bien spécifiques.

Il s’agit désormais de s’interroger sur les secteurs économiques qui sont les plus fragilisés par cette remontée rapide des taux d’intérêt. Nous pouvons ainsi citer les secteurs qui se sont nourris pendant des années des taux bas, comme l’immobilier ou le capital investissement. L’exemple de la faillite de SVB est à cet égard illustrant. La baisse conséquente des flux d’investissement dans le capital risque, a conduit les entreprises à tirer sur leurs dépôts pour poursuivre leur activité.

Pour financer cette baisse des dépôts, SVB a dû céder une partie de son portefeuille d’emprunt d’Etat. Or, avec des taux d’intérêt à leur niveau le plus élevé depuis 15 ans, les obligations cédées l’ont été en moinsvalue ce qui a conduit la banque à enregistrer des pertes et à tenter de réaliser — sans succès — une augmentation de capital.

Et maintenant, à quoi s’attendre ?

De manière générale, la hausse des taux, historiquement rapide, à laquelle nous assistons depuis un an, fragilise les acteurs financiers dont les dépôts sont à court terme et les investissements à long terme. À ce titre, l’inversion de la courbe des taux qui atteint désormais des niveaux inédits depuis 30 ans en Zone euro et 40 ans aux Etats-Unis n’est que le reflet de ce risque qui commence à se matérialiser.

Les marchés actions ont encaissé le coup, vendredi, mais sans exagération (Euro Stoxx -1,52 % sur la semaine) et restent non loin des plus hauts annuels. Les investisseurs jugent pour le moment que les faillites en question resteront localisées et que les grandes banques internationales dotées d’une meilleure supervision et d’un meilleur système de suivi des risques resteront à l’abri de la tempête.

Les événements précédents ont fait passer au second plan ce qui normalement devait être le point d’orgue de la semaine, le rapport sur l’emploi américain. Avec 311 000 créations d’emplois en février, le marché de l’emploi a encore surpris positivement (225 000 attendus). Pour autant, le ralentissement de la croissance du salaire horaire (+0,2 % contre +0,3 % en janvier) a permis de mitiger les craintes inflationnistes des investisseurs.

Cette semaine, les deux événements à suivre seront la publication de l’inflation américaine en février, ce mardi, et la réunion de la BCE, ce jeudi, qui devrait se solder par une nouvelle hausse de 50 bps des taux directeurs.

Achevé de rédiger le 13 mars 2023

Les équipes de gestion d'APICIL AM - APICIL Asset Management

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