Crédit immobilier : la revalorisation des taux d’usure s’accélère en juillet 2023

Immobilier - Ce jeudi 29 juin, la Banque de France a dévoilé les taux d'usure qui entreront en vigueur en juillet 2023. Pour les prêts sur 20 ans et plus, le taux d'usure passe le seuil symbolique de 5 %. Quelles perspectives pour le coût du crédit d'ici fin 2023, compte tenu de la mensualisation du taux d'usure ? Le point du Courrier Financier — avec les réponses exclusives d'Olivier Lendrevie, président de CAFPI.

C’est une première depuis 2012. La Banque de France (BDF) dévoile ce jeudi 29 juin les nouveaux taux d’usure, qui s’appliqueront à partir du 1er juillet prochain. Ils sont en forte hausse, à 5,09 % pour les prêts sur 20 ans et plus — la durée d’emprunt la plus fréquente. Ils atteignent 4,84 % pour les prêts sur 10 à 20 ans. Par rapport à fin 2022, cela représente deux points de hausse. « La hausse des taux de crédit a été très rapide ces dernières semaines. Sans la décision de réviser mensuellement les taux d’usure, ils seraient actuellement à 4,5 % », affirme Julie Bachet, directrice générale de Vousfinancer (courtier en crédit immobilier).

Vers un crédit de plus en plus cher ?

Historiquement, la BDF calculait les taux d’usure sur un rythme trimestriel. Mais « ce mécanisme de calcul était devenu obsolète dans une période de remontée rapide des taux », nous confiait en mars dernier Pierre-Etienne Beuvelet, directeur et fondateur du réseau IN&FI Crédits. Jusqu’à fin 2023, le taux d’usure sera réévalué sur un rythme mensuel. « La remontée des taux d’usure est une bonne nouvelle. Mois après mois, ils deviennent moins bloquants et permettent théoriquement de financer davantage d’emprunteurs… Sauf que dans les faits, les taux des crédits augmentent, mais pas les volumes », pointe Julie Bachet.

« Mécaniquement, de part sa formule de calcul, le taux d’usure augmente plus vite lorsque les taux sont élevés : lorsque les taux de crédit sont plus élevés, la marge d’un tiers l’est aussi, et donc la hausse des taux d’usure est plus importante », ajoute Sandrine Allonier, porte-parole de Vousfinancer. L’appel d’air pour les candidats à l’accession à la propriété sera donc de courte durée. La hausse des taux d’usure entraîne l’augmentation des barèmes bancaires. Les taux de crédit pourrait ainsi atteindre 5 % début 2024, d’après le courtier en prêt immobilier CAPFI. Son président, Olivier Lendrevie, répond en exclusivité au Courrier Financier.

3 questions à… Olivier Lendrevie, président de CAFPI

Crédit immobilier : la revalorisation des taux d'usure accélère en juillet 2023
Olivier Lendrevie

Le Courrier Financier : Qu’est-ce que le taux d’usure ? Dans un contexte de hausse des taux, pourquoi a-t-il été mensualisé jusqu’en janvier 2024 ?

Olivier Lendrevie : Le taux de l’usure est calculé à partir des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit augmentés d’un tiers. Il s’agit du taux maximal auquel une banque peut légalement prêter. Jusqu’à janvier 2023, les taux d’usure étaient publiés au Journal officiel à la fin de chaque trimestre pour le trimestre suivant. Ils sont depuis mis à jour de manière mensuelle.

Cette mesure a permis de fluidifier un marché du crédit qui était devenu dysfonctionnel. Entre juin et décembre 2022, la hausse des coûts de refinancement combinée aux retards d’ajustement du taux d’usure avait contraint de nombreuses banques à limiter drastiquement leur production de crédit immobilier. Avec la mensualisation, le taux d’usure s’adapte plus rapidement à la réalité du marché.

C.F. : Le taux d’usure monte à 5 % pour les prêts sur 20 ans à partir du 1er juillet prochain. Comment cet « appel d’air » va-t-il influencer le marché du crédit ?

O.L. : Les nouveaux taux d’usure viennent d’être relevés par la Banque de France. Nous passons la barrière symbolique de 5 % pour les prêts sur 20 ans et plus, soit un retour au niveau de 2012. Cette hausse permet aux banques de reconstituer les marges qu’elles avaient perdues. Nous pourrions voir revenir des banques qui s’étaient mises en marge du marché depuis un an, ce qui serait une bonne chose. Mais à court terme, cela signifie que les taux de crédit vont poursuivre leur progression pour atteindre 4 % d’ici à la fin de l’été.

C.F. : Quel sera l’impact de cette décision sur l’activité des courtiers en crédit ? Quel(s) changement(s) doivent-ils anticiper pour accompagner leurs clients ?

O.L. : Avec la hausse des taux, il n’a jamais été aussi important de bien préparer sa demande de crédit et d’optimiser son plan de financement. En vérifiant par exemple l’éligibilité de l’emprunteur aux différents prêts aidés (Prêt à Taux Zéro, Action Logement) ou aux dispositifs d’aides proposés par de nombreuses communes et collectivités territoriales. Au-delà de comparer les offres des différentes banques, c’est cela aussi, la valeur ajoutée d’un courtier. 

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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