Crédit immobilier : le HCSF va-t-il relancer le chantier ?

Actualités - Ce lundi 4 décembre, le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) a annoncé de nouvelles règles d'octroi pour le crédit immobilier. Que retenir de ces mesures ? La production de crédit à l'habitat va-t-elle redémarrer en France ? Le point avec Le Courrier Financier.

Crédit immobilier : le HCSF relance le chantier

Conception Mathilde Hodouin – Réalisation Amandine Victor

Le chantier du crédit à l’habitat va-t-il redémarrer ? Ce lundi 4 décembre, le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) a annoncé de nouvelles règles d’octroi pour l’accès au crédit immobilier. L’autorité déclare avoir ainsi pris acte de « certaines difficultés opérationnelles dans l’utilisation des dérogations et de la dynamique du marché ». De quelles mesures s’agit-il ? Comment les professionnels du crédit immobilier réagissent-ils à cette annonce ?

Trois ajustements des règles d’octroi

Trois évolutions techniques sont au programme. Tout d’abord, la durée maximale du prêt est rallongée pourra aller jusqu’à 27 ans en cas de rénovations d’un montant supérieur à 10 % du prix global de l’achat. Ensuite, les intérêts des prêts relais ne seront plus comptés dans le taux d’effort. Enfin, la règle du 35 % d’endettement maximal se desserre un peu. Les banquiers peuvent toujours y déroger dans la limite de 20 % des crédits octroyés, mais cette disposition s’appliquera désormais sur trois trimestres glissants — et non trimestre par trimestre, comme c’était le cas jusqu’ici. Objectif, donner plus de flexibilité aux établissements de crédit.

En France, la production (hors renégociations) de crédit à l’habitat s’établit à 9,2 milliards d’euros en septembre 2023. Ce chiffre, publié par la Banque de France, révèle un fort recul par rapport aux niveaux records de 2022 — avec 16,4 milliards d’euros en septembre 2022. Pour le HCSF, « le ralentissement du crédit au secteur privé non financier reflète principalement la transmission attendue de la politique monétaire, le relèvement des taux d’intérêt réduisant la demande de crédit ». Le 26 octobre dernier, la banque centrale européenne (BCE) annonçait une pause dans sa politique de hausse des taux — une première depuis 16 mois.

D’après le HSCF, la situation serait sous contrôle. « Cette évolution est cohérente avec la baisse du nombre de transactions et l’attentisme observé sur le marché immobilier, alors que les prix s’ajustent progressivement aux nouvelles conditions de taux d’intérêt », commente le HSCF. Mais cette opinion est loin de faire l’unanimité chez les professionnels du crédit immobilier. « la menace du surendettement des ménages (…) c’est hors sujet. Il n’y a pas de surendettement lié au crédit immobilier en France » affirme ainsi Maël Bernier, directrice de la communication et porte-parole du courtier en crédit MeilleurTaux.

Redonner de l’air au marché

Pour l’industrie du crédit, c’est une occasion manquée. « Ce n’est pas avec ces annonces que nous allons redonner de l’air au marché immobilier. La table n’a pas été renversée et il est réellement dommage que la seule mesure efficace qui aurait été de décider d’un moratoire sur les règles du HCSF (…) n’ait pas été retenue », se désole Maël Bernier. Plus virulent dans son propos, l’Union des intermédiaires de Crédit (UIC) — syndicat des courtiers en crédit immobilier — se dit « atterré » par l’absence d’évolution des règles encadrant l’accès au crédit immobilier et évoque une « obsession pour les mesures inutiles ».

Les promoteurs non plus, ne sont pas enchantés. « Le HCSF fait une nouvelle fois dans la demi-mesure », déplore Loïc Cantin, président de la FNAIM. Il regrette notamment que l’allongement de 2 ans de la durée des prêts concerne uniquement les travaux de rénovation supérieurs à 10 % du coût total du projet — et non l’ensemble des achats immobiliers. Pour relancer le marché de l’immobilier et préserver le pouvoir d’achat des ménages, la FNAIM réclame « des mesures de bon sens ». La fédération recommande la portabilité et la transférrabilité des crédits immobiliers, une mesure « sans surcoût pour les finances publiques » assure Loïc Cantin.

La portabilité du crédit immobilier permettrait à un propriétaire qui souhaite revendre, de conserver l’emprunt qu’il a déjà contracté. A l’inverse, la transférabilité permettrait d’attacher le prêt non à l’emprunteur, mais au bien lui-même. Le crédit passerait ainsi de l’ancien propriétaire au nouveau. La FNAIM juge cette option « moins risquée que les crédit relais, déconseillés par les professionnels de l’immobilier en période de hausse des taux et de marché immobilier au ralenti ». Couplée avec « la réintroduction de la déduction fiscale des intérêts d’emprunt pour l’achat d’une résidence principale », cette mesure limiterait l’impact de la hausse des taux.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

Voir tous les articles de Mathilde