Télétravail : l’IEIF évalue l’impact de la Covid sur la demande de bureaux en Ile-de-France

Immobilier - Cette semaine, l'Institut de l'Epargne Immobilière et Foncière (IEIF) publie une étude sur l'impact de la crise sanitaire et du télétravail en 2020, sur le marché de l'immobilier de bureaux en Ile-de-France.

L’Institut de l’Epargne Immobilière et Foncière (IEIF) — centre d’études, de recherche et de prospective indépendant spécialisé en immobilier — publie ce lundi 11 janvier une étude sur l’impact potentiel du télétravail sur le parc et la demande de bureaux en Ile-de-France. Cette étude s’inscrit dans le cadre des travaux conduits pour son Club Analyse & Prévision constitué d’investisseurs institutionnels (français et internationaux), de banques ou encore de promoteurs-constructeurs.

Crise sanitaire et recours au télétravail en 2020

Si le recours au télétravail s’est évidemment amplifié très fortement avec la crise sanitaire, une réduction potentielle du nombre de postes de travail ne se répercute pas de manière symétrique sur les surfaces occupées par les entreprises. Pour ce premier exercice de simulation, l’IEIF a considéré quatre critères principaux impactant la surface de bureaux occupée et a retenu trois scénarios.

Selon ces simulations, l’IEIF estime par exemple sur une base de 41 % des entreprises qui passeraient à deux jours de télétravail par semaine, que le gain de surface envisageable serait de 27 %. Sur le parc de bureaux francilien, cela représenterait 3,3 millions de m2 (soit 6,5 %) et un impact déflationniste sur la demande placée de 14 % par an.

L’impact potentiel du télétravail sur les entreprises — et en conséquence sur le marché des bureaux — doit être apprécié selon plusieurs angles : productivité, rentabilité, créativité, sociabilité, cohésion, partage des valeurs, etc. Il est encore un peu tôt pour dresser un tableau complet.

Par ailleurs, le télétravail a une face bureaux et une face logements, avec des conséquences en termes d’équilibre entre les deux marchés — comme un déplacement de la demande de mètres carrés, mais pas forcément au même endroit — et sur l’évolution de l’offre de logement.

Quel impact potentiel du télétravail sur la demande en bureaux ?

Le télétravail, et de manière plus large les différentes pratiques de travail nomade, ont commencé à prendre de l’ampleur en France depuis 10 ans. Mais selon les estimations, jusqu’à deux tiers des heures « télétravaillées » l’étaient de façon informelle. La prise en compte du télétravail dans la loi, puis les ordonnances Macron, ont permis la mise en place de pratiques plus encadrées, notamment dans le cadre de chartes de télétravail.

Le recours au télétravail s’est évidemment amplifié très fortement avec la crise sanitaire, notamment dans les périodes de confinement : en Ile-de-France, selon IPR, 39 % des salariés ont pu télétravailler, tous secteurs d’activités confondus. Toutefois, la proportion de personnes en télétravail a chuté beaucoup plus fortement en France après la fin du premier confinement que dans les pays où le recours à cette modalité de travail est culturellement plus développé et mieux accepté.

Enfin, si le télétravail permet d’envisager une réduction potentielle du nombre de postes de travail, celle-ci ne se répercute pas de manière symétrique sur les surfaces occupées par les entreprises : il devient essentiel de développer d’autres types d’espaces de convivialité, de réunions, ou encore de créativité afin de développer les interactions indispensables à la vie des entreprises.

Trois scénarios retenus par l’IEIF

Dans ce premier exercice de simulation, l’IEIF a considéré quatre critères principaux qui impactent la surface de bureaux occupée :

  • la part des entreprises qui choisiraient de mettre en œuvre une politique de télétravail et décideraient de manière corrélative de réduire leur empreinte immobilière ;
  • le nombre de jour de télétravail retenu en moyenne au sein de ces entreprises ;
  • la part des emplois de bureaux permettant la mise en place du télétravail au sein de ces entreprises ;
  • le gain de surface envisageable, compte tenu de l’impact de la réduction des postes de travail liée à la mise en place du télétravail, mais également de la nécessité de repenser l’aménagement des espaces de travail, notamment en développant les espaces collectifs.

Dans ce cadre, trois scénarios ont été retenus :

  • un premier scénario « Si la crise n’avait pas eu lieu… », qui prolonge les tendances observées avant 2020, qui se caractérisaient déjà par une montée en puissance progressive, mais réelle, du télétravail et plus largement du travail nomade ;
  • un deuxième scénario « Accélération de la transformation des modes de travail » qui intègre un impact réel, mais non maximaliste, de la crise sanitaire et s’appuie notamment sur une enquête réalisée par Savills en octobre 2020 ;
  • un troisième scénario « Le monde d’après en rupture » qui simule ce qui pourrait advenir si les évolutions accélérées par la crise sanitaire entraînaient une véritable rupture en termes d’organisation du travail, privilégiant de manière beaucoup plus forte le recours au télétravail. Ce scénario s’appuie notamment sur une enquête réalisée par Parella, également en octobre 2020.

Paramètres retenus dans le cadre des scénarios

Quels impacts potentiels sur le marché des bureaux franciliens ?

Pour calculer cet impact, l’IEIF est parti de la dernière estimation du parc de bureaux francilien réalisée par l’ORIE, soit 54,5 millions de m2 au total et 50,9 millions de m2 occupés (en retenant un taux de vacance de 6,6 % fin 2020) et a pris en compte les emplois de bureaux (privés et publics) recensés en Ile-de-France fin 20201, soit 2,5 millions d’emplois. Cela représente un ratio moyen de 20,4 m2 occupés par emploi de bureau, en ce compris les quotes-parts d’espaces communs.

Impact des scénarios sur le parc de bureau francilien

Cet impact déflationniste sur le parc de bureaux franciliens prendra du temps. Les entreprises doivent d’abord définir, puis implémenter une nouvelle organisation du travail, en lien avec leurs stratégies, leurs cultures, les besoins/attentes de leurs salariés, les institutions représentatives du personnel… Elles devront ensuite définir la ou les déclinaisons immobilières de cette nouvelle organisation, en termes de localisation, d’aménagement des espaces de travail, et in fine en termes de surface occupée.

De plus, la mise en œuvre de ces évolutions ne pourra se faire qu’en tenant compte des dates de sortie possible des baux en cours, qui peuvent s’étaler jusqu’à 9 ans (voire plus) pour un certain nombre de grands groupes ayant signé des baux longs. Pour passer des stocks aux flux, l’IEIF a donc considéré que l’impact sur le parc de bureaux francilien se ferait sur 10 ans.

Impact des scénarios sur la demande placée et l’absorption nette

Marché de l’immobilier de bureaux, perspectives pour 2021

Il y a évidemment une corrélation forte entre le niveau potentiel de télétravail et le niveau de richesse et de tertiairisation d’une économie, à laquelle s’ajoutent des explications culturelles et organisationnelles. Les différents scénarios étudiés devront être affinés dans les prochains mois, notamment au regard des orientations qui seront finalement retenues par les entreprises, une fois le contexte très spécifique lié à la crise sanitaire moins présent, mais également sur le plan géographique.

Il est en effet très probable que ces évolutions n’impactent pas de la même manière les différents sous-marchés franciliens. De même, les impacts dans les régions seront différents, notamment en lien avec le niveau de tertiairisation des différentes zones géographiques et de disponibilité de transports en communs maillés.

La Rédaction - Le Courrier Financier

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