Emmanuel Macron : second mandat et nouvelle donne

Asset Management - Le 24 avril dernier, Emmanuel Macron a été réélu Président de la République française. Dans un contexte inflationniste, quelle sera sa marge de manœuvre économique ? Quelles perspectives pour la croissance française en 2022 ? Olivier Guillou, Directeur de la gestion chez Ecofi, partage son analyse.

Emmanuel Macron est réélu pour un second mandat avec 58,5 % des voix contre Marine Le Pen. Les Français ont donc voté majoritairement pour le projet pro-européen et la nécessité d’une accélération de la transition énergétique. Néanmoins, ces élections soulignent les fractures profondes de la société française, et gouverner ne sera pas aisé. Les élections législatives apparaissent à ce stade incertaines pour dégager une majorité de gouvernement, même si historiquement les Français ont toujours donné au président élu une majorité de gouvernement.

Pouvoir d’achat des Français

Mais, cette fois-ci, la désaffectation et la désaffiliation des partis historiques de gouvernement font peser un doute sur cette issue. Rappelons que la thématique majeure de la campagne a été le pouvoir d’achat, la plupart des candidats ayant mis en avant des dépenses supplémentaires compensées par des hypothèses d’économies plus ou moins incertaines. L’Institut Montaigne avait réalisé un travail d’estimation des mesures proposées avant le premier tour.

Si nous nous intéressons aux programmes des deux finalistes, il ressortait que le programme de Marine Le Pen aggravait le déficit français de 105 Mds€ contre « seulement » 44 Mds€ pour celui d’Emmanuel Macron, alors que tous deux les estimaient neutres. Avec l’accumulation des crises et la guerre en Ukraine, les chiffres d’inflation à travers le monde ne fléchissent pas, ce qui va de continuer à peser sur les ménages et les entreprises. Pour mémoire, les dernières publications s’établissent à 7,5 % en eurozone, 8,5 % aux Etats-Unis et 5,1 % en France.

La question de l’inflation

C’est précisément sur le sujet de l’inflation que la Banque centrale européenne (BCE) était attendue lors de sa réunion du 14 avril dernier. Aucune modification n’a été annoncée sur le plan des taux directeurs, même si la sémantique est en train de changer. Le programme de réduction des achats, dit APP (Asset Purchase Program), a été confirmé ; il passera à 30 Mds€ par mois en mai puis à 20 Mds€ en juin.

Pour mémoire, le PEPP (Pandemic Emergency Purchase Program), mis en place pour soutenir l’activité en lien avec la Pandémie de Covid-19, a été arrêté en mars 2022. Au troisième trimestre, l’APP devrait s’arrêter sans que toutefois plus de précisions sur le calendrier exact aient été dévoilées. Les taux directeurs ne seront relevés que lorsque ce programme d’achat sera terminé.

Quelle politique monétaire ?

La prudence des autorités monétaires européennes vient de l’estimation de la progression de l’inflation (au plus haut depuis la création de l’euro), alors que les perspectives de croissance se dégradent fortement. L’attitude de la Banque centrale vis-à-vis de ce chiffre peut sembler trop prudente, mais l’inflation européenne reste majoritairement expliquée par la hausse des prix énergétiques. Christine Lagarde a de plus insisté sur les faibles hausses de salaires constatées.

Cette dernière notion est importante pour comprendre la différence de discours avec la Fed qui se montre beaucoup plus agressive. Pour la même période, l’inflation est ressortie à 8,5 % aux Etats-Unis, mais les tensions sur le marché du travail impliquent des hausses de salaires significatives (+5,5 % au quatrième trimestre) laissant présager la mise en place d’une boucle prix-salaires inquiétante que la banque centrale américaine entend couper par son action sur les taux d’intérêt.

Forte pression en zone euro

Mais, comme aux Etats-Unis, la pression monte en Europe face à cette perte de contrôle et donc de crédibilité. Sur la semaine, les marchés corrigent sous l’effet de la hausse des taux, principalement aux Etats-Unis, alors que l’Europe est stable (Eurostoxx -0,1 %). Les taux d’intérêt restent orientés à la hausse, avec des discours « hawkish » des Banques centrales.

Olivier Guillou - Ecofi

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