Un éléphant, ça Trump énormement

Asset Management - Déjouant la quasi-totalité des pronostics, Donald J. Trump a été élu président des Etats-Unis d’Amérique. Le Parti républicain garde le contrôle de la Chambre des Représentants et du Sénat. Cette élection pourrait être lourde de conséquences, le programme et la personnalité de M. Trump étant sensiblement différents de ceux des candidats républicains plus traditionnels.

En se limitant aux principaux aspects macroéconomiques ou ayant un impact assez direct sur l’économie du programme du candidat, les principales caractéristiques nous semblent en être les suivantes :

Fiscalité

* Baisse massive des impôts sur les ménages et les sociétés.

* Faire payer la défense et l’OTAN par les Alliés.

Immigration

* Expulsion en deux ans des 11,3 millions d’immigrés illégaux, soit 3,5 % de la population et 5,1 % de la population active.

* Limitation des arrivées d’immigrants, notamment venant de pays jugés suspects ou infiltrés.

* Construction d’un mur à la frontière du Mexique, aux frais du Mexique.

Politique commerciale

* Renégocier ou dénoncer l’ALENA (NAFTA) et le TPP.

* Imposer des droits de douane de 45 % à la Chine jusqu’à ce qu’elle laisse flotter sa monnaie.

* Imposer des droits de douane aux entreprises qui délocalisent au Mexique.

Énergie 

* Déréglementer le pétrole, le charbon, l’eau, éventuellement dénoncer la COP21.

Si les mesures budgétaires nécessitent l’aval du Congrès, les mesures sur l’immigration ou les accords commerciaux peuvent être prises par « executive order » (ordonnances présidentielles sans confirmation parlementaire). Les baisses d’impôts ne sont pas compensées par des baisses de dépenses, ce qui devrait aggraver considérablement le déficit.

Le rythme d’expulsion de « sans papiers » envisagé est inapplicable (ce serait plus de 15 000 expulsions par jour). Mais même en étalant la mesure sur toute la durée du mandat, cela fera une ponction sur la main d’œuvre qui réduira sensiblement la croissance et le potentiel de croissance.

D’un côté l’application de droits de douane élevés à deux des principaux partenaires commerciaux du pays renchérira les prix à la consommation ; il est probable, d’un autre côté, que ces mesures entraîneront des représailles commerciales : les entreprises exportatrices pourraient en souffrir.

Moody’s a entrepris de chiffrer les conséquences économiques de ce programme, grâce à un modèle réputé voisin de celui de la Réserve fédérale. Ils ont retenu trois scénarios : l’application telle quelle du programme, au total assez improbable – les Républicains traditionnels seront réticents à accroître spectaculairement le déficit budgétaire ; un programme allégé, où Congrès et présidence font chacun un pas ; et enfin un programme très édulcoré, où le Congrès reprend la main. Cela étant, M. Trump arrive en position de force, et le Congrès pourrait, au moins dans un premier temps, le suivre dans la plupart de ses propositions.

On voit que l’application quasi-intégrale du programme entraîne une choc sensible : la hausse du déficit et l’accélération de l’inflation obligent la banque centrale à relever nettement le taux directeur, ce qui plonge le pays dans la récession et fait fortement augmenter le chômage. Plus le programme serait dilué, plus l’effet sera modéré. Le déficit budgétaire devrait avoir, en revanche, un effet expansionniste de court terme, vite compensé par les effets négatifs qu’on vient d’évoquer.

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Ces prévisions sont présentées dans les tableaux joints. Pour M. Trump en revanche, la croissance supplémentaire permise par les baisses d’impôts et la déréglementation de l’énergie permettra de financer la rénovation des infrastructures, et créer 25 millions d’emplois en dix ans (il n’y aura pas 25 millions de personnes disponibles à cet horizon, surtout avec les expulsions d’immigrés).

Dans le discours qu’il a tenu après l’annonce de sa victoire, M. Trump a tenu des propos relativement conciliants, adressant à Mme Clinton ses félicitations pour sa campagne et ses remerciements pour ces années passées au service de l’Etat. Il veut être le président de tous les Américains, et rénover les infrastructures (routes, ponts, tunnels, aéroports, hôpitaux, écoles…). Il prendra ses fonctions le 20 janvier 2017.

Philippe Weber - CPR AM

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