La France va-t-elle avoir son propre Justin Trudeau ?

Asset Management - Les résultats du premier tour des élections présidentielles françaises ont qualifié Emmanuel Macron et Marine Le Pen pour le second tour avec, respectivement 23,9 % et 21,4 % des suffrages. Pour la première fois en soixante ans, les deux principaux partis de gouvernement ont été éliminés au premier tour traduisant le vent de changements qui souffle sur la scène politique des économies avancées. Et si M. Macron, nouveau visage de la politique centriste, devenait en France l’équivalent de Trudeau au Canada ? Les résultats de dimanche confirment les récents sondages et nos hypothèses de base.

Pour les investisseurs, la présence du candidat centriste au second et dernier tour augmente considérablement les chances d’avoir un président pro-UE. Selon les sondages, Emmanuel Macron aurait entre 80 % et 85 % de possibilités de remporter le scrutin, probabilité renforcée par les soutiens de François Fillon et Benoît Hamon.


Le spectre d’une victoire de Marine Le Pen aurait un impact négatif sur les actifs français et européens capable, selon nous, de déclencher une réaction négative à l’échelle mondiale en raison des conséquences pour l’avenir de l’UE/zone Euro. Les résultats du premier tour devraient contribuer à apaiser la crainte d’une victoire de l’extrême droite en France puisque les sondages actuels suggèrent qu’Emmanuel Macron devrait confortablement l’emporter sur Marine Le Pen au deuxième tour. Cela dit, l’éventualité d’un scandale impliquant le candidat centriste et/ou d’une attaque terroriste reste une inconnue incontestable, alors que les sondages se sont quant à eux souvent trompés par le passé.

Les résultats de dimanche devraient être positifs pour l’Euro comme le montre déjà l’évolution des cours. Toutefois, la hausse devrait plafonner aux alentours de 2 % à 3 % sur une base pondérée des échanges dans la mesure où le cours de l’Euro n’a jamais privilégié le scénario d’une victoire de Madame Le Pen.

Cependant, nous prévoyons un resserrement important de l’écart entre les obligations françaises à 10 ans et le Bund allemand par rapport aux niveaux actuels. Par ailleurs, alors que l’attention va pouvoir se recentrer sur la reprise économique que l’on observe actuellement dans la région, les actions européennes devraient également enregistrer une hausse importante. En outre, l’écart significatif de valorisation par rapport aux actions américaines rend selon nous, les actions européennes attrayantes, d’autant plus que la vigueur de la reprise de l’économie aux États-Unis faiblit et que le système législatif américain devrait être une entrave majeure face à la politique de relance de Donald Trump (en termes, d’ampleur, de portée et de calendrier).

Au-delà de l’Europe, nous maintenons notre vision positive vis-à-vis des actifs émergents et nous privilégions davantage la dette et les actions en monnaie locale plutôt que la dette brute en devise forte. Nous pensons que la synchronisation de deux tendances, celle d’une reprise économique et d’une l’inflation qui reste sous contrôle, continue d’être favorable pour les marchés émergents. 

Pour conclure sur une note prudente : bien qu’il semble que l’Europe ait, pour l’instant, évité l’ouragan du populisme et que la France appelle de ses vœux une nouvelle ère politique avec la perspective d’une victoire de Macron, les investisseurs ne doivent pas oublier que 40 % des votants ont choisi un candidat de l’extrême gauche ou de l’extrême droite. La faible capacité de l’UE à faire face aux chocs et le besoin de réforme resteront des facteurs importants à l’avenir. Tout excès d’optimisme des institutions européennes face aux grands défis que l’Europe doit relever sera prématuré dans la mesure où de nouvelles élections à l’issue très incertaine sont prévues en Italie en mai 2018. Nous suivrons de près tous ces événements.

Salman Ahmed

Stratégiste d'investissement

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