Florian Breton – MiiMOSA : crowdfunding, « financer la transition agricole avec jusqu’à 7 % d’intérêt »

Responsabilité sociale - Pourquoi investir son épargne dans le financement d'une agriculture durable ? Le prêt participatif (crowdlending) peut-il contribuer à la lutte contre le changement climatique ? Florian Breton, fondateur de la plateforme MiiMOSA, répond en exclusivité au Courrier Financier.

Promouvoir l’agriculture durable ? C’est le deuxième des Objectifs de Développement Durables (ODD) de l’ONU d’ici 2030. Ce n’est pas qu’une question de lutte contre la faim dans les pays émergents : le secteur agro-alimentaire va jouer un rôle clé dans les prochaines décennies dans la lutte contre le réchauffement climatique. Créée en 2018, la plateforme de financement participatif (crowdfunding) MiiMOSA — dédiée à l’agriculture durable — a déjà collecté 60 millions d’euros pour financer 4 500 projets. Quels sont les enjeux du secteur agro-alimentaire ? Florian Breton, fondateur de MiiMOSA, répond en exclusivité au Courrier Financier.

Le Courrier Financier : Quelle est votre approche de l’épargne verte chez MiiMOSA ? Que signifie « donner du sens à son épargne » ?

Florian Breton - MiiMOSA : crowdlending, « financer la transition agricole et alimentaire en percevant jusqu’à 7 % d’intérêt »
Florian Breton

Florian Breton : Aujourd’hui, en dépit des enjeux sociaux, économiques, environnementaux et climatiques, la gestion de notre épargne n’a aucun sens. Les banques ne sont pas suffisamment responsables du pouvoir immense que nous leur confions. Par leurs activités de financement, en partie avec notre épargne, les banques françaises représentent huit fois les émissions de la France d’après l’Oxfam.

Éviter nos déplacements carbonés, consommer de manière responsable et locale, prendre soin de la nature et du vivant, cette transition citoyenne de bon sens n’est rien si nous ne donnons pas une autre utilité à notre épargne. Ainsi, plus que « donner du sens » à notre épargne, il faut lui « donner du pouvoir » afin qu’elle ait un impact positif sur notre avenir commun. 

C.F. : Pour les investisseurs, comment fonctionnent les prêts rémunérés sur votre plateforme ?

F.B. : Nous avons ouvert le prêt rémunéré pour permettre aux personnes physiques et morales de financer la transition agricole et alimentaire en percevant jusqu’à 7 % d’intérêt. Tout s’effectue directement sur notre plateforme et c’est très simple ! Une fois le projet financé, c’est-à-dire lorsqu’il atteint son objectif, les remboursements sont versés mensuellement (le plus souvent) sur le compte personnel MiiMOSA, selon un échéancier déterminé au préalable.

C.F. : Vous avez lancé la mobilisation « Objectif 1 % » en 2021. De quoi s’agit-il ?

F.B. : Ce projet est ambitieux mais nécessaire. L’objectif : multiplier par trois la part d’épargne responsable des Français. L’épargne des Français représente 5 000 milliards d’euros, dont 450 milliards dorment paisiblement sur des comptes épargne. 

Face à ces constats, nous avons décidé de réunir dix autres acteurs engagés autour de nous, avec pour objectif de travailler à la prise de conscience du pouvoir de l’épargne et de rendre accessibles les solutions d’épargne rentable et engagées. L’objectif chiffré : passer de 0,4 % de placements verts et solidaires à 1 % (Finansol 2020).

C.F. : Suite à la crise sanitaire, les Français disposent d’un surplus d’épargne de 157 milliards d’euros. Quel est l’impact écologique de cette épargne (Livret A, LDD, assurance-vie… ou comptes courants) ?

F.B. : En tant que citoyen-épargnant, à défaut de devenir des acteurs puissants et engagés pour une plus grande justice sociale, financer la transition écologique et prendre part aux défis de l’humanité, notre épargne nous met en danger.

Sans le savoir, 70 % de nos dépôts financent les énergies fossiles et des industries polluantes, qui aggravent le réchauffement climatique, le déclin de la biodiversité et les conditions de vie des Hommes. Pour vous partager un ordre d’idée, nous émettons autant de CO2 en faisant un aller-retour en avion de Paris à New-York qu’avec 2 500 euros d’épargne !

C.F. : Comment MiiMOSA mesure l’impact de son action depuis sa création en 2015?

F.B. : Chaque année, nous réalisons une étude d’impact auprès de nos communautés de porteurs de projets (nous en avons 5 000 à fin 2021) et de financeurs — ils sont 400 000 à fin 2021. Cette étude nous permet de mesurer notre impact en termes de préservation/création d’emplois, bilan carbone, préservation d’hectares. Grâce à MiiMOSA, par exemple, près de 70 % de nos porteurs projet ont pu engager leur entreprise — agricole ou agroalimentaire — dans une démarche de transition écologique.

C.F. : Dans quels secteurs faut-il investir aujourd’hui pour avoir un impact positif ?

F.B. : Parmi les nombreux secteurs à soutenir, l’agriculture est en tête. Ce secteur réunit l’ensemble des grands enjeux de notre siècle — santé, alimentation, climat, environnement). Dans notre pays, il conduit une importante mission sociale et économique.

Sur le seul sujet du climat, les agriculteurs vont contribuer à l’atténuation des dérèglements par la conservation, la fixation et la substitution du carbone — mais également en créant des systèmes agricoles en mesure d’amortir les épisodes climatiques extrêmes.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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