Finance responsable : investir dans le cycle de l’eau pour protéger la biodiversité

Responsabilité sociale - En 2021, la biodiversité marine recule à cause de l'activité humaine. Pourtant, lutte contre le réchauffement climatique et protection des espèces sont directement liées. Comment gérer l'océan de manière durable et préserver sa biodiversité ? Quelles approches déploient les gérants d'actifs ? Tour d'horizon avec Le Courrier Financier.

Sans sa biodiversité, notre planète serait sans vie. Pourtant, les activités humaines provoquent son déclin massif. Le 10 juin dernier, les experts de l’ONU sur la biodiversité (IPBES) et le climat (GIEC) tiraient la sonnette d’alarme. Le 27 juillet dernier, la Banque de France publiait une étude sur les risques financiers liés à la biodiversité. A l’heure où se développe l’ESG et la finance durable, les conseillers en gestion de patrimoine (CGP) doivent s’emparer du sujet de la biodiversité. Pendant la Semaine de la Finance Responsable, jusqu’au vendredi 8 octobre partout en France, regardons ce qui se passe du côté des rivières et des océans.

Cycle de l’eau et cycle économique

Malgré son nom, la planète Terre est recouverte à plus de 70 % d’eau — dont 0,7 % d’eau douce liquide. D’ici 2030, l’accès à l’eau représente un défi croissant. Une personne sur trois n’a toujours pas accès à une eau salubre, d’après un rapport conjoint de l’UNICEF et de l’OMS publié en 2019. Cette thématique de l’accès à l’eau potable constitue aujourd’hui le sixième Objectif de Développement Durable (ODD) des Nations Unies. Plus de 80 % des eaux usées par les activités humaines sont rejetées directement dans les rivières et les océans — ce qui aggrave la pollution. La croissance démographique accentue le stress hydrique.

Et au milieu coule une rivière… Face à la hausse de la demande en eau, les opportunités d’investissement se multiplient tout au long de la chaîne de valeur du marché mondial de l’eau. Dans une étude récente (en anglais), le gérant d’actifs Robeco évalue les secteurs où investir — que ce soit sur les marchés développés ou sur les marchés émergents. Lancé en 2001, son fonds actions « RobecoSAM Sustainable Water » mise sur la croissance des entreprises liées à l’analyse de l’eau, aux infrastructures (distribution et irrigation, notamment) et au traitement des eaux usées. En août 2021, le fonds a dépassé les 3 milliards d’euros de capitalisation.

Finance durable : investir dans le cycle de l'eau
Boiling Point – For professional investors Global growth,
climate change and the increasing pressure for water resources

Source : Robeco (octobre 2021)
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Source : Robeco (octobre 2021)

Pour son gérant Dieter Küffer, en charge du fonds depuis sa création il y a 21 ans, « les défis de l’approvisionnement en eau propre sont toujours d’actualité ». La demande en eau suit la progression de l’urbanisation et les changements alimentaires associés. 40 % de la population mondiale devrait souffrir de la pénurie d’eau d’ici 2030 d’après l’ONU. Mais l’accès à l’eau n’est pas qu’une question de survie, c’est un facteur économique clé. « C’est l’une des principales opportunités de croissance de notre époque », résume Robeco. La chaîne de valeur de l’eau devrait représenter 900 milliards de dollars d’ici 2023 — soit environ 780 milliards d’euros.

Finance durable : investir dans le cycle de l'eau
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Source : Robeco (octobre 2021)

Protéger l’océan et sa biodiversité

Homme libre, toujours tu chériras la mer ! Oui, à condition de conserver et d’exploiter de manière durable l’océan. Près de 500 millions de personnes dans le monde dépendent des ressources de la pêche pour survivre. Ce rôle repose sur une biodiversité riche — 235 000 espèces répertoriées — mais encore mal connue : près de 2 millions d’espèces marines resteraient à découvrir. Mais cet écosystème est menacé. Dans un récent rapport publié le 7 septembre dernier, Meeschaert Amilton AM indique la biodiversité marine a reculé de 39 % entre 1970 et 2010. Près d’un tiers des espèces de poissons sont menacées d’extinction.

Les coraux ont déjà diminué de moitié, et risquent de disparaître d’ici 2050. L’activité humaine est directement en cause à travers la surpêche, la pollution (plastique, notamment) ou encore les eaux de ballast, nécessaires pour maintenir la ligne de flottaison des navires mais qui charrient aussi les espèces invasives. Préserver la biodiversité marine représente « un enjeu écologique et économique crucial ». Le gérant s’y attèle à travers son fonds « MAM Transition Durable Actions » labellisé ISR. Les investissements directement liés à la préservation de la biodiversité marine représentaient 31 % du portefeuille au 30 juin 2021.

Finance responsable : investir dans le cycle de l'eau et la biodiversité
Empreinte Océans de MAM Transition Durable Actions
Source : Meeschaert AM
Finance responsable : investir dans le cycle de l'eau et la biodiversité
Empreinte Océans de MAM Transition Durable Actions
Source : Meeschaert AM
Finance responsable : investir dans le cycle de l'eau et la biodiversité
Empreinte Océans de MAM Transition Durable Actions
Source : Meeschaert AM

De son côté, Sanso Investment Solutions (Sanso IS) — société de gestion d’actifs entrepreneuriale indépendante — mise sur la philanthropie. Le gérant reverse 10 % des frais de gestion de son fonds obligataire à échéance ISR  « Sanso Objectif Durable 2024 » à deux associations de préservation des océans : Surfrider Foundation Europe et l’Institut Océanographique Fondation Albert 1er Prince de Monaco. « Nous souhaitions prendre notre part à la préservation de cette immense réserve de biodiversité. Les clients sont très réceptifs », explique Benoit Magnier, DG de Sanso IS. Dorénavant, les asset managers ne veulent plus naviguer en eaux troubles.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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