Crédit immobilier : le taux d’usure à 4 % va-t-il apporter un nouveau souffle au marché ?

Immobilier - Ce mercredi 1er mars, la Banque de France revalorise le taux d'usure à 4 %. Ce seuil symbolique permettra-t-il de fluidifier l'accès au crédit immobilier dans un contexte de hausse des taux ? Eléments de réponse avec Sylvain Lefevre, Président de La Centrale de Financement — en exclusivité au Courrier Financier.

Vers un accès plus fluide au crédit immobilier ? La Banque de France dévoile ce mercredi 1er mars un taux d’usure de 4 % en mars 2023 pour les prêts immobiliers de 20 ans et plus — un seuil symbolique inédit depuis 2016. Ce nouveau taux d’usure doit « apporter la visibilité nécessaire aux futurs acquéreurs » explique Sylvain Lefevre, Président de La Centrale de Financement, contacté par Le Courrier Financier. Le courtier, spécialiste en prêt immobilier, espère une détente du marché des taux et un retour à la normalité avant l’été 2023.

Pour rappel, le taux d’usure représente le taux plafond — c’est-à-dire le taux légal maximum auquel les établissements de crédit ont le droit de prêter de l’argent. Depuis le 1er février 2023, la Banque de France réévalue le taux d’usure sur un rythme mensuel. Ce changement intervient à titre dérogatoire, jusqu’en juillet prochain. Il s’agit de « raccrocher le taux d’usure aux réalités du marché » dans un contexte de hausse continue des taux, explique le courtier — sur fond de flambée inflationniste depuis la crise Covid et le déclenchement de la guerre en Ukraine (+6,2 % en février 2023, selon un calcul provisoire de l’Insee).

Fort recul des octrois de crédit

Jusqu’ici, les courtiers se plaignaient d’un taux d’usure trop bas — responsable selon eux de la hausse des refus d’octroi de crédit. Au S2 2022, l’Observatoire Crédit Logement/CSA constate un recul de -35,2 % du nombre de d’emprunts immobiliers accordé par les banques. La chute de la production de crédits s’est amplifiée au T4 2022. « Une telle chute ne s’était pas constatée depuis l’automne 2008, au plus profond de la crise financière internationale venue des Etats-Unis : elle est aussi plus prononcée que celle observée durant le premier confinement, en raison de la durée de la baisse de l’activité », indiquent les auteurs de l’étude.

Le problème d’un « taux d’usure inadapté » s’est fait sentir dès juillet 2022. Quand la Banque centrale européenne (BCE) a relevé son principal taux de refinancement, la profitabilité des nouveaux prêts bancaires a chuté. Sans surprise, l’offre bancaire s’est contractée. Le 1er octobre dernier, la revalorisation du taux d’usure a relancé la hausse des taux des crédits immobiliers. Et le phénomène se répète à chaque hausse de taux de la BCE. Dans ce contexte, « l’offre de crédits n’a donc pas pu se redresser suffisamment, à la différence de ce qui se constate habituellement au début de l’automne », précise l’Observatoire.

Trois questions à… Sylvain Lefevre, Président de La Centrale de Financement

Crédit immobilier : le taux d’usure à 4 % va-t-il apporter un nouveau souffle au marché ?
Sylvain Lefevre

Le Courrier Financier : Pourquoi les refus de crédit immobilier ont-ils augmenté en 2022 ? Quel impact pour les courtiers ?

Sylvain Lefevre : L’augmentation des refus est multifactorielle. Le taux d’usure reste l’élément principal expliquant cette augmentation. Cette cause est couplée à la baisse des prix de l’immobilier qui n’a pas encore eu lieu. Une augmentation des taux d’intérêts sur l’intégralité de l’année 2022 a pour conséquence d’augmenter le nombre de refus de crédit en raison du taux d’endettement.

L’impact pour les courtiers, c’est que les partenaires bancaires ont réduit voire arrêté leur offre de crédit immobilier au fur et à mesure au cours de l’année 2022. Les courtiers ont donc eu un nombre de partenaires réduits pour l’ensemble des clients qui les ont sollicités [NDLR La Centrale de Financement estime que 40 % des ménages français ont recours aux services d’un courtier]. 

C.F. : Faut-il s’attendre à une forte hausse des taux d’intérêt des banques en mars 2023 ?

S.L. : Depuis plusieurs mois la hausse des taux est engagée, et le mois de mars ne devrait pas déroger à cette règle. Nous notons que la hausse des taux d’intérêt sur le mois de mars est moins importante que lors des mois précédents. Cette tendance peut signifier que les banques souhaitent à nouveau acquérir de nouveaux clients via le prêt immobilier et donc fluidifier le marché.

C.F. : Chez La Centrale du Financement, comment accompagnez-vous les emprunteurs dans ce contexte ?

S.L. : Nous avons pris le parti d’accompagner le plus en amont possible nos clients — avant même la signature d’un compromis — afin de personnaliser au mieux la faisabilité des projets des clients. Plus que jamais le rôle d’un courtier devient primordial dans un processus d’achat. 

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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