Retour de l’inflation : est-ce le moment de se réintéresser aux TIPS US ?

Asset Management - Face à la crise sanitaire, la bourse connaît une forte volatilité. Dans l'attente du rebond économique, les marchés craignent les conséquences économiques de la récession. Est-ce le bon moment pour réinvestir dans les Treasury Inflation-Protected Securities (TIPS) 5 ans US ? L’équipe de Recherche et de Stratégie de SPDR livre son analyse.

Si d’importantes interrogations subsistent autour du rebond de la croissance économique et de sa robustesse, les craintes liées à une potentielle déflation induite par la récession se sont quant à elles rapidement dissipées. Les Treasury Inflation-Protected Securities (TIPS) 5 ans US ont rattrapé une grande partie de leurs pertes du début d’année : ils affichent désormais un rendement à 1,40 %, et sont revenus à moins de 20 bp de leur niveau de rendement moyen à 5 ans.

Faiblesse du dollar et US TIPS sous-pondérés

Plusieurs facteurs ont concouru à ce rattrapage : les indicateurs économiques ont connu un rebond rapide, ce qui a entraîné une hausse des prix des matières premières, notamment du pétrole. C’est notamment sur la base du comportement de ce dernier facteur, que l’indicateur PriceStats de State Street Global Markets a conclu à un retour à des niveaux « normalisés » d’inflation.

La faiblesse du dollar fut un autre facteur de soutien de ce rattrapage, avec un recul de près de 4 % de l’indice DXY pondéré en fonction des échanges commerciaux depuis fin juin. Cette faiblesse de la devise devrait persister ; l’USD n’étant plus soutenu par des taux d’intérêt plus élevés. De plus, le lourd bilan qui semble se profiler outre-Atlantique post Covid-19 et les discussions dans l’impasse du côté du Congrès ne devraient pas nourrir, à court terme, du rebond du billet vert.

Les données de State Street sur les flux et les actifs détenus en portefeuille montrent que jusqu’à la fin du deuxième trimestre, les US TIPS étaient fortement sous-pondérés dans les allocations — comme nous l’avons montré dans le SPDR Bond Compass du troisième trimestre. Comme les anticipations d’inflation ont rebondi, une partie de cette sous-pondération a certainement été rattrapée.

Tensions politiques et barrières commerciales

Les inquiétudes autour d’une possible résurgence de l’inflation à plus long terme semblent elles aussi réelles, si nous en croyons le nouveau record atteint par le prix de l’or, souvent considéré comme une valeur refuge pour se prémunir de l’inflation. Plusieurs facteurs semblaient toutefois concourir à limiter l’inflation : le vieillissement de la population, comme le processus de libéralisation du commerce mondial qui est un facteur clé de la tendance structurelle à la baisse de l’inflation observée depuis les années 1980.

Mais avec la nouvelle escalade des tensions politiques mondiales et la rupture du consensus libéral selon lequel « plus il y a d’échanges, mieux c’est » (en anglais more trade is better), cette tendance semble s’être inversée. Les barrières commerciales risquent de faire leur réapparition dans les prochaines années, et la restriction des flux migratoires conjuguée à un accroissement des délocalisations des chaînes de production, devraient venir alimenter la pression sur les coûts des entreprises.

Rendements réels en chute libre outre-Atlantique

L’attractivité des US TIPS est réelle, et ce malgré une pression à la baisse considérable à l’œuvre sur les rendements nominaux. Les rendements réels outre-Atlantique se sont effondrés à des niveaux historiquement bas et ne semblent plus offrir de réelles perspectives si nous en croyons les rendements réels US à 10 ans qui affichent désormais -95 pb.

« Les points morts d’inflation anticipée restent faibles
par rapport à leur moyenne historique »

Toutefois, ce niveau n’est pas nécessairement si bas si l’on considère le reste de l’environnement international : les rendements réels de la zone euro à 10 ans s’inscrivent à – 1,3 % et le Royaume-Uni à un inquiétant – 3 % — donnée toutefois faussée selon nous par le fait que les UK Linkers utilisent l’indice des Prix de Détail (IPD) qui intègre notamment une composante immobilière qui s’inscrit généralement d’environ 100 pb au-dessus de l’indice des prix à la consommation (IPC). De fait, une estimation plus réaliste de l’inflation outre-Manche avoisinerait plutôt les -2 %.

Ces faibles niveaux rendements réels peuvent être le fruit de la pandémie ou en d’autres termes, la « sanction » du marché post Covid-19. Il nous apparaît plus plausible que le fragile équilibre « croissance inflation » ait été négativement affecté par la pandémie — puisque la croissance risque d’être freinée par la productivité des entreprises « zombies » aux prises avec des niveaux d’endettement élevés —, tandis que l’inflation pourrait augmenter pour les raisons détaillées plus haut.

Vers une inflation à la hausse

Étant donné le nombre de facteurs qui soutiennent l’inflation à la hausse, il semble peu probable que les anticipations en matière d’inflation s’effondrent pour revenir aux niveaux observés en mars 2020. Les US TIPS offrent donc encore une certaine protection contre un rebond de l’inflation américaine et devraient continuer à bénéficier du programme d’achats
de la Fed. La classe d’actifs pourrait donc encore rester attractive si les craintes autour d’une résurgence de l’inflation se confirment.

L’équipe de Recherche et de Stratégie de SPDR - SPDR

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