Redressement des taux : quelles perspectives pour les marchés mondiaux au T2 ?

Asset Management - Au deuxième trimestre 2021, les marchés restent concentrés sur l’évolution des taux, l’inflation et la politique des banques centrales. Quelles perspectives se dessinent ? Le point avec Alexandre Baradez, Responsable Analyses Marchés d'IG France.

Les marchés devraient rester focalisés au cours du deuxième trimestre sur l’évolution des taux, les perspectives d’inflation et le discours des banquiers centraux, sur fond d’évolution du rythme des campagnes de vaccination aux Etats-Unis et en Europe notamment.

Taper tantrum au T2 2021

Il est possible que le second trimestre voit l’équivalent d’un « taper tantrum » se mettre en place avec la reprise de la croissance mondiale qui se poursuit et l’allègement des mesures sanitaires aux Etats-Unis notamment. Mais il ne s’agira pas d’un « taper tantrum » à proprement parler, car les banques centrales ne devraient pas changer la cadence des achats d’actifs, notamment en ce qui concerne la Fed et la BCE.

Cette dernière a même indiqué accroître le rythme des achats d’actifs au second trimestre pour éviter toute dégradation des conditions financières. Le risque ne viendrait pas d’un changement de cadence opérationnelle des banques centrales mais plus d’une évolution du sentiment de marché à l’égard de la communication des banques centrales et de l’horizon d’intervention.

Choix des valeurs cycliques

Si le marché est convaincu que l’économie américaine se redressera plus vite que prévu, il n’attendra pas que la Fed change son discours pour anticiper et c’est ce qu’il s’est déjà passé en février : l’affaissement du nombre de cas journaliers de Covid-19 aux Etats-Unis, des chiffres économiques meilleurs qu’attendu et l’anticipation des effets du plan Biden ont entretenu l’accélération du prix des matières et tiré à la hausse les anticipations d’inflation.

Alors même que le discours de la Réserve Fédérale n’a pas changé durant cette période, ce « cocktail » a généré un redressement sensible des taux nominaux long terme mais également des taux réels. Ce qui a donc partiellement pesé sur l’effet TINA et entraîné une rotation sectorielle très visible sur les marchés, les investisseurs faisant le pari des valeurs cycliques au détriment des valeurs de croissance.

2021, scénario de la reprise

Les marchés ont déjà bien « pricé » le rebond de la croissance mondiale en 2021, notamment en Europe mais surtout aux Etats-Unis où le SP500 évolue 17 % au-dessus de ses niveaux pré-crise. Et que dire du Nasdaq100 qui malgré la correction marquée des dernières semaines évolue encore 35 % au-dessus des niveaux d’avant pandémie. Les petites capitalisations ont également déjà très largement anticipé le rebond de la croissance et des bénéfices prévu cette année avec par exemple le Russell 2000 qui évolue 38 % au-dessus des niveaux de d’avant crise.

La rotation sectorielle ne devrait pas être aussi forte au second trimestre et nous pourrions surtout observer une consolidation globale des indices, qu’ils soient un peu plus « value » comme le CAC40 ou le DAX ou plus « growth » comme le Nasdaq100 ou même le SP500. Les secteurs boursiers qui ont fortement performé depuis le début de l’année eu Europe comme ceux du Tourisme/Loisirs, Automobile, Banque ou encore Pétrole/Gaz ne pourront pas continuer sur la même cadence et vont devoir « assimiler » pendant quelques temps les données macro pour s’assurer que le scénario de reprise joué plusieurs mois en amont était le bon.

Environnement de taux

De la même manière, il serait étonnant que les valeurs technologiques repartent très fortement tout de suite sachant que, même si l’environnement de taux pourrait encore rester sous contrôle des banques centrales quelques temps, il ne devrait pas se dégrader pour autant. Il est très probable qu’un point bas cyclique ait été touché sur les taux de référence comme le 10 ans allemand ou américain durant cette crise.

Les valeurs de croissance dont les valeurs technologiques bénéficieront donc beaucoup moins de l’effet TINA et devrait continuer à subir un peu de pression en termes de « rotation », moins spectaculaire toutefois que ce qui a été observé au premier trimestre.

Quid des indices européens ?

Les perspectives semblent assez favorables à moyen-terme pour les indices européens. D’abord parce-que la BCE pourrait rester plus accommodante que la Fed en raison du décalage de pression sanitaire entre les deux zones économiques. Ensuite parce-que les indices européens comme le CAC40 ou le DAX sont moins sensibles aux valeurs de croissance et un peu plus aux valeurs cycliques qui devraient continuer de profiter de la reprise économique, après une potentielle phase de consolidation dans les mois qui viennent.

Un indice comme l’EuroStoxx50 hors dividende par exemple se retrouve pour la quatrième fois depuis 2015 dans cette zone de prix après plusieurs creux successifs qui ont tous été comblés. C’est clairement une preuve de résilience dans l’attente d’une cassure de cette zone de « résistance », sachant que le sommet de 2007 se trouve 20 % plus haut et constitue donc l’objectif pour le marché à moyen-terme.

Vers la sortie de crise

Si la sortie de crise s’opère comme après la crise de subprimes, nous sommes potentiellement en train d’entrer dans la deuxième phase d’un processus qui en compte trois : une première phase où les marchés rebondissent dans un environnement de taux bas avec un fort soutien monétaire, une deuxième phase où les marchés consolident avec le redressement des taux souverains en anticipation d’une modification à venir des conditions monétaires, puis une troisième phase où les indices reprennent leur course haussière en parallèle de la hausse des taux qui se poursuit sur fond de croissance, de hausse de salaires et des prix.

Alexandre Baradez - IG France

Responsable Analyses Marchés

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