Pays émergents : le retour de l’inflation ?

Asset Management - En pleine crise du coronavirus, la dette émergente a connu une forte hausse. Les investisseurs sont-ils en train d'assister à un retour de l'inflation ? Comment peuvent-ils jouer sur ce thème dans leur portefeuille ? L’équipe de Recherche et de Stratégie de SPDR livre son analyse hebdomadaire.

La dette libellée en devise locale émergente (EM) a connu une forte progression depuis avril 2020, bien que la classe d’actifs semble avoir atteint ses limites en août ; les gains de l’affaiblissement continu du dollar et des flux de coupons étant compensés par la baisse des prix des titres obligataires.

C’est un fait : le mois d’août n’a pas été favorable aux obligations d’État dans leur ensemble, mais la performance des marchés émergents a été décevante compte tenu de l’environnement plus propice au risque.

D’un point de vue historique, l’indice Bloomberg Barclays Emerging Markets Local Bond est corrélé à 79 % avec le Global High Yield contre seulement 29 % pour l’US Aggregate, qui est largement constitué de bons du Trésor américain — basé sur 10 ans de données mensuelles. En d’autres termes, il se comporte bien plus comme un actif « à risque ».

Poussée inflationniste dans les pays émergents

La situation a cependant évolué et désormais, tous les investissements sont passés au crible de leur exposition éventuelle aux impacts du Covid-19. À cet égard, les marchés émergents n’ont pas tiré leur épingle du jeu aussi bien que les marchés développés.

Même si de nombreuses économies émergentes ont « rouvert leurs portes », elles enregistrent un nombre croissant de nouveaux cas, du fait de leur capacité limitée à protéger les travailleurs et les entreprises de la même manière que les pays développés.

En outre, de nombreux pays émergents connaissent une poussée inflationniste suite au rebond du pétrole et à la dépréciation de leurs monnaies observées plus tôt en 2020. Cela se manifeste par une hausse des prix à l’importation (source : State Street Global Markets).

Facteurs de soutien pour cette classe d’actifs

Cela pourrait certainement mettre un terme à l’assouplissement des politiques monétaires dans certains pays émergents. Ceci étant dit, dans la perspective d’améliorer le rendement et de diversifier les risques, nous continuons à considérer la dette émergente comme un élément essentiel de toute allocation de portefeuille. Il existe en effet encore un certain nombre de facteurs de soutien à la classe d’actifs :

  • malgré ses récentes baisses, le dollar semble toujours surévalué de 10 % par rapport à un panier de devises émergentes, selon les indices fair value de State Street Global Markets. Nous prévoyons que le dollar continuera de s’affaiblir, ce qui pourrait soutenir la hausse des valorisations des titres émergents si leurs monnaies s’apprécient ;
  • la recherche du rendement est un puissant moteur d’investissement. Le rendement est rare dans l’environnement actuel, mais l’indice Bloomberg Barclays Emerging Markets Local Bond Index délivre 3,6 % de rendement sans prendre de risque de duration important (Yield-to-worst 3,63% et duration ajustée de l’option 6,55 ans au 3 septembre 2020). La compression continue des spreads sur le High Yield signifie naturellement que les marchés émergents deviennent une alternative plus intéressante pour les investisseurs.
  • les marchés émergents ont subi des pertes importantes lors des turbulences du marché au début de l’année, mais il semble que les flux commencent à s’inverser. Les flux vers les ETFs émergents sont positifs depuis avril 2020 puis se sont accélérés en juin et juillet avec des entrées nettes de 2,1 milliards et 1,8 milliard de dollars, respectivement. Le mois de juillet a également été marqué par des flux notables d’entrées dans les fonds d’investissement — actifs et passifs — de l’univers émergent dans son ensemble, avec plus de 5,4 milliards de dollars dans ce secteur.

Comment envisager un retour sur la dette émergente ?

C’est le moment d’opter pour des stratégies de réduction des risques. Les inquiétudes autour de la faiblesse de la croissance émergente et d’une potentielle résurgence de l’inflation dans certains pays de l’univers émergent sont réelles.

Les pays identifiés comme étant les plus exposés au risque de hausse de l’inflation par les indicateurs PriceStats sont (hors Asie) la Turquie et trois pays d’Amérique latine : le Brésil, la Colombie et l’Uruguay. La répartition géographique de l’indice Bloomberg Barclays Emerging Markets Local Bond Index réduit ces risques grâce à l’importance de son allocation sur la zone asiatique (48,7 %), contre 30,5 % pour l’indice JP Morgan EM Local Government Bond Index.

Cela signifie de facto une moindre exposition aux Amériques, avec une exposition nulle à l’Uruguay et un poids combiné de 11,2 % « seulement » au Brésil et à la Colombie — contre 15,5 % dans l’indice JP Morgan. Enfin, la pondération de la Turquie dans l’indice est faible : 1,7 % seulement.

Une protection supplémentaire contre l’inflation

Pour ceux qui redoutent encore que la poussée d’inflation à court terme ne soit préjudiciable à la dette émergente, l’ETF SPDR Bloomberg Barclays EM Inflation Linked Local Bond UCITS constitue une piste intéressante. A l’exception de 2019, l’indice suivi par cet ETF a généralement montré la même corrélation inverse avec le dollar que la dette nominale.

Le graphique ci-dessous montre l’indice par rapport à la valeur inversée du DXY (panier de devises contre le dollar américain pondéré en fonction des échanges) et souligne la tendance de l’indice à afficher une performance positive (exprimée en dollars) en cas de faiblesse du dollar. Ainsi, même s’il est à l’épreuve de l’inflation, il se comporte de la même manière qu’un fonds libellé en devise locale.

« L’indice Bloomberg Baclays EM Inflation Linked
a généralement évolué à l’inverse du dollar »

L’indice de dette émergente

En termes de distribution géographique, l’indice de dette émergente indexée à l’inflation est potentiellement plus bien adapté pour protéger contre les régions sous pression inflationiste. Il est peu exposé à l’Asie (3,7 %), où nous considérons que l’inflation est moins menaçante et à laquelle l’indice Bloomberg Barclays Emerging Markets Local Bond Index est quant à lui fortement exposé.

À l’inverse, il est exposé à hauteur de 42,5 % aux Amériques et à 16 % à la Turquie, deux zones au sein desquelles nous considérons que les tensions inflationnistes sont les plus fortes et donc que les portefeuilles obligataires ont le plus besoin de protection.

Enfin, une régression de l’indice Emerging Markets Inflation Linked par rapport à l’indice nominal Emerging Markets Local Bond suggère que l’indice lié à inflation reste moins cher de 10 points par rapport à l’indice libellé en devise locale — basé sur 1 an de données quotidiennes (r-squared 83,5 % – Déviation Standard 6,3) au 3 septembre 2020.

Comment jouer ce thème en portefeuille ?

Si les fonds continuent d’affluer vers les titres de la dette émergente, l’indice lié à l’inflation pourra donc certainement jouer un rôle de rattrapage. Les investisseurs peuvent jouer le thème de la dette émergente détaillé ci-dessus via un ETF SPDR.

L’équipe de Recherche et de Stratégie de SPDR - SPDR

Voir tous les articles de L’équipe de Recherche