Métaux précieux : l’or, une performance en trompe l’œil

Asset Management - Depuis le début de l'année 2022, les observateurs jugent décevante la performance de l'or. Quel a été l'impact de l'inflation sur cette valeur refuge, exprimée en dollars ? Quelle évolution attendre désormais pour les cours de l'or ? Le point avec les équipes de Natixis Wealth Management.

Décevante la performance de l’or ? Depuis le début de l’année, le prix du métal précieux, exprimé en dollars, a reculé d’environ 8 % et même de 20 % depuis les plus hauts annuels du 8 mars. Une évolution jugée décevante par beaucoup d’observateurs dans un contexte de conflit militaire en Europe, qui aurait pu susciter un flux acheteur vers cet actif jouant alors pleinement son rôle de valeur refuge.

Une valeur refuge bousculée…

D’autant qu’aux tensions géopolitiques et militaires a rapidement succédé une inflation aux niveaux que nous n’avions plus connus depuis plusieurs décennies. Là encore de quoi favoriser l’or considéré comme l’actif par excellence, capable de conserver sa valeur dans le temps, malgré son rendement nul. Une deuxième raison de voir l’or s’apprécier donc, sans que cela ne soit le cas…

Cependant, si nous y regardons de plus près, la performance du métal jaune amène quelques commentaires relativisant sa mauvaise performance. Tout d’abord, l’or est l’actif ayant le mieux résisté depuis le début de l’année, en comparaison des marchés actions en recul de 20 % à 30 % selon les places, et les indices et de plus de 15 %, globalement, pour les marchés obligataires. L’écart est encore plus flagrant avec le bitcoin, un temps présenté comme un « concurrent » de l’or en tant que valeur refuge…

Mais une performance négative demeure toutefois décevante par rapport à ce statut de valeur refuge et une analyse plus fine de l’évolution des cours de l’or permet aussi de relativiser cette appréciation. Dans la séquence actuelle, nous ne pouvons ainsi éluder la vive appréciation du dollar. En conséquence, l’or, exprimé en euros, progresse de +7,5 % et demeure proche de ses plus hauts historiques. Il avance même de plus de +17 % pour un investisseur japonais, en raison du fort affaiblissement du yen. De quoi relativiser la contreperformance de cet actif pour une grande partie des investisseurs internationaux !

…par un contexte inflationniste hors norme 

Par ailleurs, se concentrer sur le recul de l’or depuis son sommet de début mars fait oublier qu’il se payait en fait déjà cher. C’est bien lors de la période précédant le début des hostilités en Ukraine que l’or a joué son rôle de valeur refuge. L’accumulation des craintes liées au Covid l’avait déjà fait grimper au-dessus des 2 000 dollars l’once en août 2020, alors que les obligations ne rapportaient rien. Malgré son recul, il évolue aujourd’hui finalement non loin de ces niveaux-là.

En outre, un effet balancier est vraisemblablement à l’œuvre : historiquement, le métal précieux suit l’inflation sur la durée, mais s’en écarte fortement durant quelques périodes, accélérant par rapport à l’inflation avant qu’une force de rappel ne le fasse revenir à ce que nous pourrions considérer comme sa valeur constante. A 2 000 dollars l’once, nous nous étions sans doute quelque peu éloignés de cette valeur normative.

La correction semble aujourd’hui logique après cette appréciation. Et la situation est de plus différente, à la suite de la remontée des taux d’intérêt aux Etats-Unis et en Europe. Les obligations américaines proposent de nouveau une alternative aux actions, avec des taux d’intérêt plus élevés. Nous constatons d’ailleurs que les flux financiers, depuis mars, vont vers le dollar, valeur refuge. Alors que de leur côté, les ETF en or, voient leurs encours sous gestion diminuer chaque mois.

Quelle évolution attendre désormais ?

Les anticipations des niveaux de taux d’intérêt du marché ont rejoint les anticipations de la Fed. La convergence entre les deux signifie que les marchés ont intégré la hausse des taux et cela est assez favorable à l’or. L’effet surprise est désormais derrière nous…

De quoi atténuer sa baisse, mais pour une revalorisation du métal jaune, un facteur externe déclencheur sera nécessaire. Le fameux « pivot » de la Fed, autrement dit la stabilisation de ses taux, voire le début d’un nouveau cycle de baisse. A ce moment-là, s’ouvrira possiblement une fenêtre pour se repositionner sur l’or, notamment car le dollar, moins attractif, pourrait repartir à la baisse.

Cette situation pourrait aussi signifier une période de stagflation ou de récession. Ce qui constituerait une composante forte du retour de l’attractivité de l’or. Tout investisseur avec une vision diversifiée de son patrimoine, voudra alors détenir un tel actif dans son portefeuille.

Achevé de rédiger le 28 octobre 2022

Les équipes de Natixis Wealth Management - Natixis

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