Marchés financiers : quelles perspectives au 2e semestre 2019 ?

Asset Management - Les attentes du marché vis-à-vis des baisses de taux de la Fed en 2019 se sont encore accrues la semaine dernière. Par ailleurs, les rendements des bons du Trésor américain à 10 ans ont plongé à près de 2 %, dans un contexte d’intensification des tensions géopolitiques. Quelles perspectives se dessinent pour fin 2019 ? Jean Boivin, Responsable Mondial de la Recherche pour le BlackRock Investment Institute, partage son analyse.

Deux fois par an, les 100 investisseurs et responsables majeurs de BlackRock se réunissent pour un forum de 2 jours. A cette occasion, les échanges se concentrent sur les perspectives de marché et leurs implications en matière d’investissement. Lors d’une réunion qui s’est tenue à Londres début juin 2019, nous avons notamment débattu des facteurs qui pourraient entraîner une évolution macro-économique.

Nous avons aussi étudié la manière dont nos portefeuilles pourraient être préparés à une plus grande variété de scénarios futurs. Les conclusions de nos échanges se retrouveront dans notre point de vue actualisé sur l’allocation tactique d’actifs, qui sera publié avec nos perspectives pour le 2e semestre le 8 juillet. Nous en donnons ci-dessous un aperçu :

Source : BlackRock Investment Institute, juin 2019

Détérioration des relations commerciales

La majorité des participants au forum ont estimé que les actifs risqués devraient bénéficier d’un environnement favorable. La plupart prévoient qu’il pourrait se maintenir au moins 12 mois de plus, en raison de politiques monétaires accommodantes et du nombre limité de signes de déséquilibres financiers. Ceci étant, nous envisageons une plus grande diversité de scénarios, vers lesquels le régime macro-économique actuel pourrait s’orienter. L’éventualité d’une récession n’a été envisagée que comme une possibilité parmi d’autres.

Un scénario à risque élevé a pour sa part été identifié : il s’agirait d’un renversement de la tendance à la mondialisation de ces dernières décennies. Une telle situation aurait pour effet de perturber les chaînes d’approvisionnement globales des entreprises, saper la croissance potentielle et conduire à une inflation persistante. Les participants au forum ont en général convenu que la détérioration des relations commerciales globales avait aggravé l’incertitude macroéconomique et élargi l’éventail des scénarios futurs potentiels.

Un contexte en évolution

Notre conviction d’un ralentissement durable de l’expansion économique s’est renforcée au cours des six derniers mois. Lors d’un sondage effectué avant le forum, plus de 60 % des répondants prévoient un ralentissement modéré de la croissance et une inflation faible au cours des 12 prochains mois, contre seulement 40 % à envisager un tel scénario en novembre dernier. Nous avons abordé 2019 sur la base d’un consensus, qui anticipait un léger ralentissement de la croissance mondiale et un risque faible de récession à court terme aux États-Unis.

Il nous a néanmoins paru nécessaire d’équilibrer judicieusement risque et performance en renforçant la résilience des portefeuilles, en raison des risques croissants, dont l’intensification des tensions commerciales et les craintes d’une récession. À la fin du premier trimestre, ces risques subsistaient. Cependant, une Réserve fédérale américaine (Fed) attentiste, une économie mondiale certes en ralentissement mais toujours en croissance et une baisse de la perception de risques géopolitiques nous ont amenés à anticiper un contexte positif à court terme pour les actifs risqués. Depuis lors, le risque d’une guerre commerciale s’est accru.

Anticipation des baisses de taux de la Fed

L’intensification des tensions commerciales et ses répercussions incertaines sur les chaînes d’approvisionnement mondiales amènent beaucoup d’entre nous à se préoccuper de ses conséquences éventuelles. Nous voyons maintenant dans ce conflit géopolitique grandissant le risque majeur menaçant l’expansion mondiale, plutôt que les préoccupations traditionnelles de fin de cycle telles que l’aggravation de déséquilibres financiers. Selon de nombreux participants au forum, l’accroissement significatif des tensions commerciales et stratégiques entre les États-Unis et de nombreux pays — dont la Chine et, plus récemment, le Mexique — augmente les risques à la baisse de la croissance, à court et à long terme.

Nous avons échangé sur la façon dont cela pourrait se manifester. Certains redoutent une croissance plus faible accompagnée d’une inflation plus élevée, tandis que d’autres anticipent une croissance plus faible mais qui demeurerait désinflationniste. Certains responsables des investissements de BlackRock s’attendent maintenant à ce que la croissance du G7 ralentisse plus fortement en 2019 que ce que nous avions prévu en début d’année. L’incertitude — tout comme la diversité des scénarios possibles — est accrue par l’anticipation actuelle par les marchés de baisses significatives des taux d’intérêt de la Fed — une position qui nous paraît exagérée.

Veiller sur la résilience des portefeuilles

Afin de mettre à jour nos perspectives de marché, les 100 investisseurs et responsables majeurs de BlackRock réunis à Londres se sont centrés sur un certain nombre de sujets cruciaux : les perspectives de l’économie chinoise, les voies qu’emprunteront probablement les banques centrales et leurs outils de politique monétaire face à une récession éventuelle, la trajectoire future de l’inflation et la façon de construire des portefeuilles résilients.

Ce dernier point reste pour nous un objectif clé : une majorité des responsables des investissements de BlackRock ont ​​déclaré qu’ils considéraient aujourd’hui la résilience des portefeuilles comme beaucoup plus importante qu’à l’habitude. Nous publierons nos perspectives pour le 2e semestre le 8 juillet prochain.

Jean Boivin - BlackRock Investment Institute

Responsable Mondial de la Recherche

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