Le dollar américain : une valeur refuge en période de crise mondiale ?

Asset Management - Le scénario de ralentissement de la croissance mondiale et de forte incertitude est favorable au dollar américain. Pourquoi faut-il y voir un potentiel d'appréciation supplémentaire ? Le point avec le Dr. Andrea Siviero, Investment Strategist chez Ethenea.

Le dollar américain continue de bénéficier d’une Fed agressive et d’une économie américaine résiliente. Malgré le resserrement de la position de la BCE et la forte appréciation du dollar américain en 2022, nous pensons que le dollar américain restera fort par rapport à l’euro. En revanche, nous considérons qu’une récession est presque inévitable dans les trimestres à venir pour l’économie de la zone euro, mise à mal par la crise énergétique et une confiance en baisse.

Compte tenu de la dette souveraine élevée et des divergences régionales marquées, le resserrement de la politique monétaire de la BCE reste un processus très difficile. Un resserrement de la politique de la BCE pourrait apporter un certain soulagement à court terme à l’euro en difficulté. Néanmoins, il est peu probable qu’il modifie les tendances sous-jacentes de la faiblesse de l’euro.

Politique monétaire de la Fed

En 2022, le dollar américain s’est apprécié d’environ 14 % en glissement annuel par rapport à l’euro, ce qui en fait la monnaie la plus forte du G10. Nous voyons plusieurs raisons à la force du billet vert. À titre d’exemple, malgré une certaine atonie au premier semestre 2022, l’économie américaine semble résister à une inflation élevée et à un resserrement de la politique monétaire avec un marché du travail dynamique, des augmentations de salaires saines et des dépenses solides des consommateurs et des entreprises.

Nous voyons un risque de récession aux États-Unis en cas de resserrement monétaire excessif de la part de la Fed. Au cours des prochains trimestres, la croissance économique américaine devrait dépasser celle de la zone euro et de la Chine. Ces 18 derniers mois, le dollar américain a également bénéficié de son statut de valeur refuge, attirant les flux de capitaux internationaux en période de crise mondiale.

L’économie américaine semble résister

En outre, une « prime spéciale stagflation » pour les États-Unis résulte d’une inflation élevée et d’une croissance mondiale plus faible. La force du dollar américain par rapport à l’euro a été stimulée par les faiblesses de l’économie de la zone euro et les divergences entre les politiques de la Fed et de la BCE. L’économie européenne ne s’était pas encore remise de la récession déclenchée par la pandémie lorsqu’elle a été frappée de plein fouet par les conséquences du conflit en Ukraine et les sanctions contre la Russie consécutives.

Ces dernières ont entraîné une forte hausse des prix de l’énergie et une poussée de l’inflation, ce qui a fortement ébranlé la confiance des consommateurs et des entreprises. Alors que la Réserve fédérale américaine a relevé son taux directeur de 250 points de base depuis mars, le processus d’ajustement des mesures de la politique monétaire de la BCE a été retardé par une économie en perte de vitesse, la fragmentation du marché (élargissement des écarts entre les obligations souveraines au sein de la zone euro) et les tensions politiques. Au cours de l’été, lorsque l’inflation a atteint un niveau record, la BCE a changé de ton et est devenue beaucoup plus agressive afin de faire baisser cette dernière et de contrôler les anticipations d’inflation.

Récession presque inévitable en Europe

L’économie allemande, très dépendante de l’énergie russe, est particulièrement touchée. Le secteur industriel allemand pâtit des problèmes d’approvisionnement et de la faiblesse de la demande intérieure et mondiale. Malgré un marché du travail sain, la croissance des salaires est modérée et la confiance des consommateurs n’a jamais été aussi faible suite à la diminution du pouvoir d’achat des ménages.

La BCE semble déterminée à poursuivre sur la voie du resserrement de sa politique monétaire afin de ramener l’inflation aux niveaux cibles. Malgré des politiques budgétaires de plus en plus expansionnistes et un soutien supplémentaire de plusieurs pays européens, le spécialiste d’Ethenea considère qu’une récession en Europe est quasiment inévitable.

Chine, zéro Covid et crise immobilière

En Chine, troisième grand bloc économique mondial avec les États-Unis et l’Europe, l’économie ralentit également depuis un certain temps. L’épidémie de Covid-19 a provoqué un choc de l’offre et de la demande cette année. Malgré le soutien politique, la politique zéro Covid et la crise profonde du secteur immobilier chinois pourraient déclencher une récession.

Dr. Andrea Siviero - Ethenea

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