Inflation en France : le refrain commence à être habituel

Asset Management - En juin, l'inflation a continué de croître en France. Désormais, elle atteint un nouveau plafond de 5,8%. Sylvain Bersinger, consultant économiste chez Asterès, livre ses conclusions.

Le refrain commence à être habituel : en juin, l’inflation a enfoncé un nouveau plafond, à 5,8 %. Les prix de l’énergie caracolent toujours en tête, mais l’inflation commence à se répandre à l’ensemble de l’économie. Dans ce contexte le gouvernement est pris dans un dilemme entre sa volonté de soutenir le pouvoir d’achat, de limiter le déficit et de ne pas alimenter à nouveau l’inflation par des hausses rapides de revenus.

Alimentation, une hausse des prix de 5,7%

Les prix ont poursuivi leur hausse en juin, l’inflation en glissement annuel est près de quatre fois plus forte en juin 2022 qu’elle ne l’était un an plus tôt. L’inflation énergétique est toujours aussi dynamique et a même accéléré en juin. Après 5,2 % en mai, l’inflation a atteint 5,8 % en glissement annuel en juin. Cette hausse était attendue mais se révèle néanmoins légèrement inférieure à la prévision de l’Insee de 5,9 %. Cette tendance haussière n’est pas terminé puisque d’après l’Insee l’inflation devrait se rapprocher de 7 % à l’automne avant de refluer lentement.

L’énergie tire toujours l’ensemble des prix à la hausse, avec une progression de 33,1 % en juin. Cependant, l’inflation commence à concerner une multitude de secteurs, comme l’alimentation dont la hausse des prix a atteint 5,7 % en juin (contre 4,3 % en mai) sous l’effet des blocages de la production ukrainienne. L’inflation sur les services reste élevée à 3,2 %. La seule bonne nouvelle est venue des biens industriels pour lesquels la hausse des prix a été de 2,6 % en juin, contre 3 % en mai.

Dans ce contexte inflationniste, les hausses de revenus — salaires, pensions — doivent être dynamiques pour permettre des gains de pouvoir d’achat. Alors que l’Insee prévoit 5,5 % d’inflation en 2022, les hausses de salaires des fonctionnaires et des retraites seront insuffisantes pour permettre des gains de pouvoir d’achat. Mais, augmenter fortement les revenus risque en retour d’alimenter l’inflation et de creuser le déficit public, un dilemme délicat à résoudre pour le gouvernement qui devrait avant tout cibler les ménages en difficulté.

Une hausse du point d’indice des fonctionnaires

Le Gouvernement a annoncé une hausse du point d’indice des fonctionnaires de 3,5 %, pour un coût de 7,4 milliards d’euros. Avec une inflation à 5,5 % en moyenne annuelle, la perte de pouvoir d’achat pour les fonctionnaires serait d’environ 2 %. Les retraites de base et les minimas sociaux devraient être revalorisés de 4 % cet été. Là encore, la hausse prévue est insuffisante pour compenser l’inflation.

Le gouvernement est pris dans un dilemme entre le souci de soutenir le pouvoir d’achat et la nécessaire limitation du déficit public, dans un contexte où la remontée des taux renchérira le financement de la dette publique. Les mesures prises pour limiter l’inflation — plafonnement du prix du gaz et de l’électricité, remise de 18 centimes par litre de carburant —, ont déjà coûté environ 40 milliards d’euros depuis l’automne dernier.

Une hausse importante des salaires et des pensions risque en retour de stimuler l’inflation en accroissant la demande et/ou les coûts des entreprises. Une solution pour résoudre ce dilemme serait de cibler les mesures de soutien au pouvoir d’achat vers les ménages les plus en difficulté (ménages modestes ou n’ayant pas d’alternative à la voiture). Le chèque alimentation est un type de mesure ciblé qui va dans ce sens et qui semble plus pertinent que des hausses généralisées de revenus.

Sylvain Bersinger - Asterès

Consultant économiste chez Asterès

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