Chine : beaucoup de pépites de l’IA encore à découvrir

Asset Management - L'interlligence artificielle (IA) représente un secteur technologique en pleine expansion. Si les Etats-Unis restent encore en tête, la Chine les talonne de près. Comment appréhender le marché chinois ? Pourquoi les investisseurs thématiques devraient-ils garder un œil sur ce segment ? Tobias Rommel, gérant du fonds DWS Invest Artificial Intelligence, partage son analyse.

Les criminels auraient dû y réfléchir à deux fois avant d’assister à un concert de Jacky Cheung, chanteur originaire de Hong Kong. La technologie de la reconnaissance faciale a aidé la police à attraper les contrevenants, les repérant dans la foule d’un de ses concerts. Sur le campus de l’Université Jiaotong à Shanghai, des robots autonomes de Cainiao — société de logistique chinoise créée par Alibaba — livrent les commandes à des adresses précises. Et dans le grand magasin déserté de JD dans le district de Jiading à Shanghai, plus de 1 000 robots trient et distribuent automatiquement jusqu’à 200 000 colis par jour sur 40 000 mètres carrés.

Ces exemples démontrent les progrès impressionnants réalisés en matière d’IA en Chine. Le pays souhaite devenir leader mondial du XXIe siècle dans cette technologie clé, dont le cœur de l’industrie représente plus d’un billion de yuans. A l’heure actuelle, les Etats-Unis sont toujours le leader dans les technologies de base de l’IA, telles que le machine learning, l’analyse sémantique et l’informatique cognitive, mais la Chine est en train de rattraper son retard. Cela devrait également intéresser les investisseurs qui souhaitent investir dans les technologies du futur.

Des millions de talents et d’argent

Ayant voyagé en Chine pendant près de deux mois cette année et visité une centaine d’entreprises du secteur de l’IA à Pékin et dans la région de la Grande Baie autour de Shenzhen — la réponse chinoise à la Silicon Valley — je sais de quoi je parle. Grâce au plan directeur « Intelligence Artificielle » du gouvernement, ces entreprises sont en mesure de puiser dans les finances surchargées des banques et des fonds d’investissement contrôlés par l’État. Elles bénéficient également des compétences de millions d’étudiants qui viennent d’universités chinoises ou qui rentrent au pays après une formation à l’étranger.

Enfin, et ce n’est pas le moins important, la mentalité chinoise très favorable à la technologie contribue à ce développement. Par rapport aux pays occidentaux, les Chinois sont plus ouverts aux nouvelles technologies et plus désireux de les essayer. La protection des données et de la vie privée sont plus rapidement relégués à l’arrière-plan s’ils estiment qu’une application rend leur vie plus confortable ou plus sûre. Cela permet aux chercheurs et aux entreprises d’accéder à d’énormes quantités de données « réelles », ce qui est au cœur d’un bon développement de l’IA.

LinkDoc et WeRide

Outre les progrès réalisés par la Chine en matière d’intelligence artificielle, la profondeur du marché est également surprenante. La technologie n’est pas seulement portée par des acteurs connus — pour la plupart cotés comme Alibaba ou Tencent — mais aussi par un grand nombre de petites et encore jeunes entreprises, encore inconnues. La société LinkDoc par exemple, fondée en 2014, utilise Big Data et l’IA pour la recherche sur le traitement du cancer.

La recherche est basée sur plus de trois millions de dossiers de patients souffrant principalement de cancer du sein et du poumon. Le scientifique en chef des données de la société était auparavant responsable de la conception et du développement de la plate-forme Big Data Cloud Watson Health chez IBM et les algorithmes d’IA ont été développés par les 200 ingénieurs logiciels de LinkDoc.

WeRide a été fondée en 2017 aux États-Unis, mais a ensuite déménagé en Chine où la société a depuis développé des véhicules autonomes de niveau quatre. Cette année, la flotte sera considérablement agrandie et sera bientôt utilisée pour un service de robots-taxi à Guangzhou. WeRide prévoit de réduire de moitié le tarif, qui est actuellement de trois yuans par kilomètre de taxi. J’ai eu l’occasion de monter moi-même dans l’une de ces voitures et j’ai été très impressionné par l’intégration harmonieuse du véhicule autonome dans le trafic urbain fluide.

Au-delà du marché chinois…

En outre, le gestionnaire du fonds a fait la connaissance de nombreuses autres sociétés qui illustrent le développement dynamique de l’IA en Chine. Le marché chinois à lui seul est énorme et offre aux investisseurs des opportunités attrayantes. À long terme, il est toujours intéressant d’observer quelles entreprises pourront également vendre leurs produits à l’étranger. Mais peu importe le fait de devenir des futurs champions nationaux ou internationaux, l’important est de ne pas manquer le virage vers ce marché clé.

Tobias Rommel - DWS

Gérant du fonds DWS Invest AI

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