GameStop : pourquoi l’action a atteint des sommets

Asset Management - Cette semaine, les marchés américains ont assisté à un rallye inhabituel sur l'action GameStop, porté par les investisseurs individuels contre certains fonds spéculatifs. Pourquoi le cours du titre s'est-il envolé ? Le phénomène est-il appelé à se répéter ?

GameStop : pourquoi l'action a atteint des sommets

(Conception : Mathilde Hodouin – Réalisation : Amandine Victor)

La revanche du pot de terre contre le pot de fer ? Cette semaine, les marchés ont suivi avec incrédulité l’envolée de l’action GameStop. Que s’est-il passé ? Cette entreprise texane — cotée à la Bourse de New York (NYSE) — distribue des jeux vidéo à l’ancienne, c’est-à-dire à travers un réseau de boutiques physiques. Le groupe possède notamment l’enseigne Micromania en France. Face au développement des plateformes de streaming, GameStop affiche une mauvaise santé financière. Le groupe a perdu 95 % de sa valeur sur le NYSE en 5 ans, rapporte BFM Bourse. De quoi attirer les fonds spéculatifs… mais c’était sans compter les investisseurs individuels.

Contre-attaque des particuliers

Certains hedge funds américains ont voulu profiter de la situation pour dégager de la performance, grâce à la « vente à découvert » (en anglais short selling). La manœuvre boursière — légale mais très risquée, réservée aux professionnels — consiste à emprunter des titres pour les vendre sans les détenir, en pariant sur la baisse des cours. Objectif, les racheter moins cher afin de les rendre à leur propriétaire, en empochant la différence. L’annonce d’une telle opération contre GameStop a déplu à certains internautes, particuliers habitués des forums boursiers — dont la fréquentation a explosé depuis le début de la crise.

Ces petits investisseurs ont donc « contre-attaqué ». Le coup principal est venu de la communauté « WallStreetBets » sur Reddit, qui réunit plusieurs millions de participants. Ils se sont mutuellement encouragés à l’achat, afin de faire monter le cours de l’action GameStop — une forme plutôt inédite de « pump and dump ». Objectif, obliger les « short sellers » à reculer avant que leurs pertes ne soient trop importantes. La manœuvre a duré plusieurs mois, avant d’atteindre son apogée cette semaine. Ce mercredi 27 janvier, Melvin Capital a ainsi racheté toutes les actions GameStop vendues à découvert. L’opération lui a coûté 3,75 milliards de dollars, rapporte le Financial Times.

Un acte économique, ou politique ?

Le phénomène a attiré l’attention des régulateurs américains. La Securities & Exchange Commission (SEC) et le secrétariat au Trésor ont déclaré suivre le dossier de près. L’action GameStop a terminé la séance de ce mercredi 27 janvier à 347,51 dollars (+135 %), sous l’effet de la liquidation forcée des positions de vente à découvert. Le titre a ainsi accumulé ainsi + 1 744,5 % de hausse depuis le début de l’année. Ce jeudi 28 janvier, certains courtiers en ligne — Robinhood ou encore Interactive Brokers — ont pris des mesures pour restreindre la possibilité des boursicoteurs de parier sur GameStop, qui reste malgré tout une entreprise déficitaire.

D’après le site Market Watch, difficile de dire si cette opération était légale ou non. Sur Reddit, les particuliers se réjouissent de leurs gains et affirment avoir simplement battu les investisseurs institutionnels à leur propre jeu. L’affaire prend un tour symbolique et politique — David contre Goliath — même si l’aspect purement lucratif a joué un rôle non négligeable. Depuis que l’appli Robinhood a suspendu la possibilité d’acheter l’action GameStop ce jeudi 28 janvier à cause de sa volatilité, le cours du titre a de nouveau chuté. Mais certains internautes appellent à renouveler l’opération avec d’autres entreprises ciblées par les hedge funds. Affaire à suivre ?

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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