Monart : investir dans une œuvre d’art grâce à la blockchain

Asset Management - Investir sur le marché de l'art contemporain dans un univers presque entièrement digitalisé, ça vous tente ? C'est le pari de la plateforme de trading Monart, qui lance cette semaine sa première version bêta. Le Courrier Financier vous explique le fonctionnement de cet outil.

Ce jeudi 17 octobre, l’édition 2019 de la Foire Internationale d’Art Contemporain (FIAC) ouvre ses portes au Grand Palais, dans le VIIIe arrondissement de Paris. Le même jour, la plateforme Monart (en anglais) s’ouvre aux investisseurs particuliers et professionnels. Le site internet propose d’acheter des parts d’œuvres d’art — voire des œuvres entières — en devises et/ou en cryptomonnaie, au sein de fonds conçus sur mesure. « Nous voulons démocratiser l’accès au marché de l’art contemporain, en alliant passion de l’art et placement financier », explique Malo Girod de l’Ain, Président et Co-fondateur de Monart. Ce marché — estimé à 67,4 milliards de dollars par an en 2018 — reste très hermétique aux non-initiés. Pourtant, Monart vise 1,6 % de parts de marché d’ici 5 ans.

Des tableaux et des vidéos

Où investir sur la plateforme Monart ? Aujourd’hui, l’investisseur peut déjà accéder à deux collections ou « bouquets » d’œuvres d’art. La première s’appelle « Monart Wave », elle rassemble une série d’œuvres murales — tableaux, notamment — d’une valeur totale de 500 000 euros. Le prix de la part est fixé à 100 euros. « Nous proposons une grande diversité d’artistes de nationalités différentes », se félicite Eva Hober, Chief Art Officer (CAO) chez Monart. Son travail consiste à sélectionner les œuvres d’art qui seront ensuite proposées à la vente en ligne. « Pour être choisies, il faut qu’elles correspondent à l’esprit Monart », assure-t-elle avec un sourire énigmatique. La plateforme devient définitivement propriétaire d’une œuvre dès que toutes les parts correspondantes ont été vendues.

L’investisseur réalise un bénéfice à la revente du bouquet. Si Monart suit les tendances sur le marché international de l’art contemporain avec attention, la plateforme refuse de se prononcer sur les perspectives de plus-value avant la revente. « Il faut du temps pour composer et revendre un bon bouquet, au moins un an », prévient Eva Hober. D’ici là, les investisseurs peuvent visionner leurs œuvres d’art partout dans le monde sur tablette, smartphone ou ordinateur. La deuxième collection « Video is now » se prête particulièrement à ce support numérique puisqu’il s’agit… de vidéos d’art. D’une valeur de 300 000 euros — 100 euros également le prix de la part — la sélection a été conçue « pour encourager l’acquisition de vidéo », déclare Eva Hober. « Le bouquet vidéo me tient à cœur », ajoute-elle.

L’investisseur achète ainsi 24 heures de visionnage, à étaler sur une période d’un an, soit la période de duration du fonds. Les vidéos concernées sont protégées et accessibles uniquement via la plateforme. « Les artistes se sont appropriés ce support depuis des années, mais certains collectionneurs chevronnés hésitent encore », regrette Eva Hober. « Collectionner de la vidéo reste une démarche difficile. Les visionner prend souvent plus de temps que la contemplation d’un tableau. C’est aussi un support artistique qui obéit à des problématiques spécifiques de conservation, puisqu’il faut régulièrement le réajuster au niveau technique. C’est complexe, et c’est pour cela que je m’y intéresse particulièrement », abonde Christophe Durand-Ruel, collectionneur et spécialiste en art chez Monart.

Univers numérique et monde physique

Quel avenir pour cette plateforme de trading originale ? Monart mise sur la blockchain Ethereum. Cette technologie garantit la traçabilité ainsi que l’authenticité des transactions et des signatures cryptographiques. « Le marché de l’art est moins régulé que celui de l’immobilier par exemple, mais la blockchain offre une garantie de sérieux et de sécurité », résume Malo Girod de l’Ain. Sur sa lancée, Monart crée ainsi sa propre cryptomonnaie : la « MART ». Ce jeton de sécurité ou « security token » s’achète sur la plateforme. L’investisseur percevra 100 % des profits bruts de la collection permanente de Monart et 10 % des profits bruts des transactions du marché. Les revenus seront versés en jetons sur le porte-monnaie numérique de l’investisseur.

La blockchain garantit la transparence de l’investissement, mais ce n’est pas son seul atout. Elle rend plus concrète la vente fractionnaire des œuvres d’art. Ce lien avec le monde physique prendra — à terme — la forme de prêts à des musées ou lors d’expositions. « Il est hors de question de garder les œuvres enfermées dans les locaux de stockage de Monart. Elles voyageront, ce qui contribuera à leur donner plus de visibilité », assure Eva Hober. Cette stratégie devrait permettre d’entretenir l’intérêt du marché de l’art contemporain, et donc la valeur marchande des œuvres. Une stratégie rendue possible grâce à une implantation internationale. Monart emploie aujourd’hui une équipe de 20 personnes, basées à Paris (nouvel espace d’art), Pékin (2 000 m² d’espace d’art), Genève, Malte et San Francisco.

Ce caractère planétaire permet de diversifier les œuvres d’art, en ouvrant les collections à des influences culturelles multiples. « En Chine par exemple, vous n’êtes rien sur le marché si vous excluez le téléphone portable de votre stratégie. Les investisseurs chinois ont la fibre du jeu, ils aiment parier sur le rendement de leur investissement. Avec Pauline Houl [co-fondatrice et PDG de Monart, basée à Pékin, NDLR] nous adaptons notre stratégie en conséquence », précise Malo Girod de l’Ain. De plus en plus importante sur le marché de l’art contemporain, la Chine contribue ainsi à sa liquidité. « Nous sommes convaincus que le marché de l’art a un énorme besoin de se réinventer », résume Malo Girod de l’Ain. La diversification permet de valoriser les artistes émergents ou peu connus à l’international, en les exposant à côté de célébrités du milieu.

Quel avenir pour la plateforme ?

L’avenir de Monart reste à écrire. Quelle place la technologie sera-t-elle amenée à prendre ? Les amateurs d’art peuvent-ils se passer du contact direct avec l’œuvre ? Pour le moment, Monart n’existe que dans sa version bêta. Courant 2020, elle devrait s’enrichir de nouveaux espaces d’exposition en réalité virtuelle, à travers l’onglet Art Space. Au programme, expositions virtuelles en 3D, visites en 3D des ateliers d’artistes, outils de création artistique avec la Réalité Augmentée et l’Intelligence Artificielle (IA), etc. Objectif, permettre aux spectateurs de mieux découvrir l’univers des artistes. Une façon de mieux comprendre les œuvres et d’apporter un éclairage à la fois nouveau et original.

D’ici là, Monart reste solidement ancré dans le monde réel. La plateforme organise notamment des événements artisitiques dans le monde entier, afin de promouvoir les œuvres. Fin novembre 2019, la plateforme organise à Pékin la vente de 6 œuvres d’artistes émergents. Les 30 novembre et 1er décembre prochains en France, elle parrainera également le Grand Prix du Salon « Caméra Caméra » de vidéos et d’art contemporain, à Nice. A cette occasion, la plateforme remettra la somme de 10 000 euros au lauréat du 1er Camera Award pour la meilleure vidéo. Pour finir, Monart ouvrira un espace temporaire à New York en mars 2020. De quoi s’enraciner durablement sur le marché de l’art contemporain !

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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