Coronavirus : quel avenir pour la profession de CGP ?

Asset Management - Pour la septième semaine de confinement, la CNCGP publie un sondage sur la situation de ses adhérents, dirigeants de cabinets de CGP. Comment se sont-ils adaptés aux nouvelles contraintes ? Quels enseignements vont-ils tirer de cette crise sanitaire ? Explications et perspectives.

Face au Covid-19, les conseillers en gestion de patrimoine (CGP) font le dos rond en attendant que l’orage passe. C’est le principal enseignement du sondage mené par la Chambre Nationale de Conseils en Gestion de Patrimoine (CNCGP) le 14 avril dernier, auprès des dirigeants de près de 1 650 cabinets adhérents. La profession résiste à la crise et prépare son avenir. « Il y a eu le choc de la conformité, celui de la digitalisation et maintenant celui du Covid : pour certains, ce sera sûrement le coup de pouce qui les incitera à rejoindre un groupement de CGP », explique Philippe Malatier, associé fondateur du cabinet K&P Finance (adhérent à la CNCGP).

Le règne du télétravail

La grande majorité répondants (plus de 75 %) n’a pas eu recours au chômage partiel. Cela s’explique notamment par le nombre élevé de structures unipersonnelles (plus de 50 %) parmi les cabinets adhérents de la Chambre. « Nous touchons des frais de gestion, donc l’argent continue à rentrer. Nous avons de la trésorerie, c’est normal que nous nous montrions solidaires en continuant de payer nos charges », réagit Philippe Malatier. Dans la même veine, seuls 11 % des adhérents ont demandé un report de leurs loyers commerciaux. « Nous sommes essentiels à la marche de l’économie », affirme Philippe Malatier. Les CGP ont donc massivement opté pour le télétravail (86 %) et les plans de continuité d’activité (PCA).

Cette réaction montre « leur faculté d’adaptation mais aussi de leur anticipation », selon la CNCGP. Les cabinets de CGP profitent largement de la digitalisation de leurs outils. « Nous avons lancé l’an dernier un grand chantier informatique afin de basculer nos outils de gestion dans le cloud. Sans avoir anticipé la crise sanitaire — qui l’aurait pu ? — nous avons bénéficié de cet investissement en 2020 », raconte Philippe Malatier. E-mails, réunions en téléconférence, appels téléphoniques aux clients… En confinement, K&P Finance a adopté une nouvelle routine. « Nous travaillons plus qu’en temps normal. Je me demande même si nous ne sommes pas plus efficaces », concède son fondateur.

Résilience économique

Du point de vue des CGP, hors de question d’arrêter le travail en pleine crise financière. Leur priorité reste l’accompagnement de leurs clients face aux impacts de la pandémie (87 %). Le coronavirus a généré une grande volatilité sur les marchés, avec une incidence directe sur la valorisation des actifs. Pourtant, près de 40 % des cabinets de CGP interrogés par la CNCGP s’inquiètent peu — voire pas du tout — des conséquences à long terme. « Notre modèle économique est très résilient. La crise n’a eu qu’un impact indirect. En ce qui concerne la capacité d’épargne de nos clients, nous aurons plus de visibilité début 2021 », estime Philippe Malatier.

La plupart des cabinets n’ont pas sollicité les crédits garantis par l’État (85% des adhérents). Ils sont pourtant éligibles au PGE. Suite au krach boursier de mars 2020, trois cabinets de CGP sur quatre anticipent déjà une perte de chiffre d’affaires (CA) en raison de la baisse des encours. « Notre chiffre d’affaires cette année devrait rester stable. Cela tient à notre stratégie d’investissement. Nous sommes positionnés à 70 % sur des fonds en euros, dont le capital reste garanti même en temps de crise. Nous sommes sur une tendance de long terme d’acquisition de clients. La crise n’a pas encore enrayé la machine », témoigne Philippe Malatier.

Quel horizon de reprise ?

Néanmoins, il n’en fait pas un secret : « un deuxième confinement serait catastrophique ». Toute la profession attend donc de pouvoir retourner au bureau dans des conditions à peu près normales. Ce mardi 28 avril, le Premier ministre a présenté devant les députés les grandes lignes de la stratégie nationale de déconfinement. La reprise de l’activité sera progressive, a prévenu Edouard Philippe. Le Gouvernement n’a pas encore précisé toutes les modalités du processus, et invite à la patience. Le moment pour les membres de la CNCGP de valider leurs heures de formations obligatoires en e-learning. Les sessions de formations en présentiel prévues de mai à juillet procha

D’ici là, certains seront déjà de retour physiquement sur leur lieu de travail. Parmi sa vingtaine de salariés, K&P Finance prévoit d’en faire revenir 20 % au début du déconfinement… soit une équipe d’à peine deux personnes (par roulements), pour assurer le lien avec les épargnants. « Je retourne actuellement au bureau deux fois par semaine, surtout pour relever le courrier. Nous avons encore des clients qui ne fonctionnent qu’avec le papier. Finalement, ce qui nous manque le plus pendant le confinement, c’est surtout un bon scanner et une photocopieuse ! », s’amuse Philippe Malatier.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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