La Parole aux Assos’ – CNCGP : « L’ESMA ne recommande pas l’interdiction des commissions »

Actualités - Dans ce nouvel épisode de « La Parole aux Assos’ », Le Courrier Financier reçoit Julien Séraqui, président de la CNCGP. Les dernières recommandations de l'Autorité des marchés financiers européens (ESMA) ont fait couler beaucoup d'encre. Honoraires ou commissions, quel avenir pour la rémunération des CGP-CIF ?

« Le rapport final de l’ESMA ? Beaucoup en parlent, très peu l’ont lu. L’ESMA ne recommande absolument pas l’interdiction des commissions. » Julien Seraqui, président de la Chambre Nationale des Conseils en Gestion de Patrimoine (CNCGP), tient à remettre les pendules à l’heure. Le 19 février 2020, la Commission européenne a lancé une consultation relative à la directive concernant les marchés d’instruments financiers (MIF 2). Cette réglementation, applicable depuis le 8 janvier 2018, « consacre des obligations en matière de gouvernance des instruments financiers », précise l’AMF sur son site officiel. Deux ans après, le régulateur européen tente d’évaluer l’application de la directive.

Les défauts du 100 % honoraires

Dans un premier temps, l’ESMA rappelle les conditions à remplir pour avoir le droit de percevoir des commissions. Les conseillers en investissement financier (CIF) « doivent d’abord être loyaux et honnêtes vis-à-vis de leurs clients ; ils doivent ensuite prouver que les commissions leur servent à améliorer le service fourni ; et puis ils doivent communiquer en toute transparence les coûts et les frais qui sont attachés aux investissements qu’ils conseillent », énumère Julien Seraqui. L’ESMA ajoute quelques exemples de bonnes pratiques, une liste « non exhausive » : adéquation aux besoins du clients, service de reporting et de suivi des performances, etc.

Dans un deuxième temps, l’ESMA fait état de comptes-rendus concernant « l’impact de MIF 2 sur la distribution d’instruments financiers dans différents pays en Europe ». Ainsi, d’après la BaFin — le régulateur allemand — le choix de l’investisseur dépendrait surtout de la qualité de la relation client. Enfin d’après l’ESMA, « le modèle 100 % honoraire n’a pas que des avantages », souligne le président de CNCGP. Cette organisation n’efface pas « l’advice gap ou fossé du conseil » dans lequel « seuls les clients les plus riches (10 %) peuvent rémunérer des conseillers par honoraires ». De quoi également favoriser un modèle en architecture fermée. « Le client y perdrait en diversification de ses investissements », résume Julien Seraqui.

L’importance du choix du client

D’après la CNCGP, le client doit conserver la possibilité de choisir le mode de rémunération. « Les directives européennes — MIF2 pour les instruments financiers et nous pouvons même parler de DDA pour les produits assurantiels — permettent d’avoir un business model en honoraires ou en commissions. Je ne crois pas qu’il faille privilégier un modèle plutôt qu’un autre », explique Julien Seraqui. En France, la distribution des instruments financiers repose sur les CIF. Ce système « est, à mon avis, le meilleur d’Europe », assure sereinement Julien Seraqui. Cette profession — très encadrée par le régulateur — fait ainsi l’objet d’une règlementation stricte.

Depuis le 1er janvier 2020, les CIF « n’ayant pas satisfait à la vérification des connaissances entre 2017 et 2019 et [ceux] entrées dans la profession à partir du 1er janvier 2020 [doivent] se présenter à l’examen certifié », précise le site officiel de l’AMF. « Les CIF sont formés tous les ans, et ils dépendent d’associations [dont fait partie la CNCGP, NDLR] qui sont agréées par l’AMF », rappelle Julien Seraqui. Cette organisation doit garantir la transparence en termes de coûts et de rémunération vis-à-vis des clients. « C’est un modèle peu coûteux. Le rapport annuel de l’AMF rappelle qu’en moyenne, les commissions perçue par les CIF sont de 0,3 % par an », pointe le président de la CNCGP. Les commissions ont encore de beaux jours devant elles !

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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