France : la réforme du travail soutient la croissance, bridée par le chômage et la dette publique

Actualités - La France a adopté une série de mesures destinées à favoriser la création d'emploi. Cette politique alimente une croissance économique supérieure à la moyenne du reste de la zone euro. Le gouvernement pourra-t-il toutefois réduire le chômage structurel et la dette publique ? Quelles sont les perspectives qui se dessinent ? Bernhard Bartels, Analyste chez Scope Ratings, se penche sur le sujet.

Scope Ratings estime que le gouvernement d’Emmanuel Macron a mis en place des mesures substantielles de relance par l’offre, destinées à soutenir la croissance potentielle du pays. Cette décision justifie la confirmation — le 3 mai 2019 — de la note souveraine AA attribuée à la France avec une perspective stable. Nous tablons pour 2019 sur un tassement de la croissance autour de 1,3 %, un niveau inférieur aux prévisions précédentes mais supérieur à celui des partenaires de la zone euro. Un rebond de la consommation intérieure porté par des mesures fiscales favorables et le renforcement du marché du travail en sont les principaux moteurs.

L’évolution de la dette publique à court et moyen terme

Dans un contexte de ralentissement de la croissance, la politique de relance fiscale menée par le gouvernement implique un creusement du déficit public. Celui-ci devrait franchir en 2019 le seuil de 3 % du PIB, s’écartant ainsi de l’objectif officiel précédemment fixé à 2,8 % et excédant temporairement le plafond imposé par Maastricht. 

Nous nous attendons à ce que le taux d’endettement se stabilise à 98,4 % avant de refluer progressivement. La permanence des déficits publics a limité la réduction du ratio dette/PIB ces dernières années. Selon le scénario de référence de Scope, il est peu probable que la dette publique diminue de façon substantielle à court ou moyen terme.

L’impact des réformes du gouvernement sur la croissance

Réductions d’impôts pour employeurs et salariés, baisse des cotisations sociales, réforme de la fiscalité afin de diminuer les impôts distorsifs — c’est-à-dire l’ISF — tout en élargissant l’assiette fiscale par le biais d’un relèvement du taux de CSG… Ce sont les réformes clés du gouvernement. De telles mesures sont susceptibles d’augmenter le potentiel de croissance de la France d’environ 0,1 à 0,2 point de pourcentage, comme en témoigne la croissance plus importante que prévu enregistrée durant la deuxième moitié de 2018.

La reprise de l’activité a entraîné une baisse du taux de chômage, passé de 10,4 % en 2015 à 9,1 % en 2018. L’emploi dans le secteur privé devrait continuer d’augmenter sur la période prévisionnelle, bien qu’à un rythme plus modéré qu’au cours des dernières années. Une baisse de l’impôt sur les sociétés pourrait également jouer un rôle à l’avenir, même si les créations d’emplois dans le secteur privé sont en partie neutralisées par la baisse des contrats aidés du secteur public. La croissance de l’emploi pourrait ramener le taux de chômage autour de 8 % d’ici à 2021 si le gouvernement parvient à mener à bien son programme de réformes.

Vers une décrue progressive du chômage ?

Néanmoins, des barrières persistantes à l’entrée sur le marché du travail continuent de freiner les créations d’emplois. Le fort taux de chômage des jeunes en France peut s’expliquer par des lacunes dans l’enseignement. Selon les résultats de la dernière enquête PISA menée en 2015, les élèves français de 15 ans éprouvent davantage de difficultés en lecture, mathématiques et sciences que leurs pairs de l’OCDE et des pays partenaires participant aux tests.

Voilà qui démontre l’importance de la réforme du système éducatif amorcée par le gouvernement, notamment pour les personnes peu qualifiées et les migrants. Contrairement aux baisses d’impôts ou de contributions sociales, l’impact de ces réformes sur l’économie n’est pas immédiat. Nous n’anticipons qu’une décrue progressive du chômage structurel, qui passerait de 9,2 % en 2018 à 9 % en 2020.

Bernhard Bartels - Scope Ratings

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