Christine Lagarde à la tête de la BCE : changement de personnel, mais pas de politique

Actualités - La date avait été fixée à Bruxelles pour des rendez-vous importants en Europe. Christine Lagarde — ancienne directrice du Fonds monétaire international — deviendra donc la nouvelle présidente de la Banque Centrale Européenne. A quels changements les marchés financiers doivent-ils s'attendre ? Ulrike Kastens, économiste chez DWS, partage son analyse.

Nous ne nous attendons pas à un changement soudain de politique. La politique monétaire accommodante de la BCE devrait se poursuivre, si l’inflation se maintient à un faible niveau. En tant qu’administrateur du FMI, Christine Lagarde s’est prononcée très tôt et avec insistance en faveur de l’assouplissement quantitatif — le programme par lequel la BCE achète des obligations.

Comme Mario Draghi, Christine Lagarde souligne l’importance de la politique fiscale pour soutenir l’économie européenne. Son expertise éprouvée en matière de politique fiscale pourrait l’aider à accroître encore la pression sur les chefs d’État et de gouvernement européens, afin qu’ils soutiennent la croissance. Cela pourrait également être le cas pour l’union fiscale : elle a régulièrement fait campagne en sa faveur.

Vers un changement de leadership ?

Christine Lagarde se caractérise par un style peu dogmatique, pragmatique. Elle possède également un réseau politique fort. Toutefois, il est probable de noter quelques changements dans son style de leadership. Mario Draghi avait fixé l’ordre du jour à plusieurs reprises — la dernière fois lors du Forum de la BCE à Sintra — en présentant à la presse des déclarations qui n’avaient pas encore été approuvées par le Conseil des gouverneurs. Christine Lagarde fera probablement plus d’efforts pour aligner ses décisions sur le consensus du conseil.

Bien qu’elle apporte avec elle une plus forte « gravité institutionnelle », elle n’est pas une économiste de formation et n’a pas d’expérience en tant que banquière centrale. Cela ne devrait pas que renforcer le rôle du Conseil des gouverneurs, mais aussi la position au sein du Directoire de l’économiste en chef récemment nommé — Philip Lane — qui dirigeait auparavant la Banque centrale irlandaise. Il sera ainsi le seul économiste formé au sein du Directoire de la BCE, composé de six membres.

Un autre changement au sein de la direction générale interviendra avec le départ de Benoit Coeuré dans le courant de l’année. Nous nous attendons à ce qu’il soit remplacé par un Italien, et nous nous attendons à ce que le conseil d’administration garde son inclinaison dovish.

Réaction positive des marchés

Les marchés ont accueilli favorablement le choix de Lagarde avec de nouvelles baisses des taux d’intérêt, même si la possibilité que Jens Weidmann — moins accommodant — devienne président devenait moins probable depuis quelque temps.

La réaction la plus évidente concerne les obligations d’État italiennes. Leurs rendements à 10 ans sont tombés de 2,1 % à 1,75 % au cours des trois derniers jours — imitant la baisse des obligations d’État allemandes — ce qui a encore réduit encore l’écart par rapport aux bunds.

Pour l’instant, tout indique donc à nouveau que les taux d’intérêt resteront bas — plus bas pendant plus longtemps — même si nous pensons que cette tendance ralentira rapidement. 

Ulrike Kastens - DWS

Economiste

Voir tous les articles de Ulrike