Inflation : la BCE rend sa copie et s’aligne sur la Fed

Actualités - Cette semaine, la Banque centrale européenne (BCE) maintient sa politique accommodante, et s'aligne sur la stratégie de la Réserve fédérale américaine (Fed). Objectif, soutenir l'économie de la zone euro le temps que l'inflation « transitoire » se stabilise à 2 %. Combien de temps la BCE va-t-elle maintenir cette stratégie colombe ?

Inflation : la BCE rend sa copie et s'aligne sur la Fed

(Conception : Mathilde Hodouin – Réalisation : Amandine Victor)

« Don’t Fight the Fed ». L’adage boursier — en français, « ne combattez pas la Fed » — se vérifie encore cette semaine. La Banque centrale européenne (BCE) s’engage ce jeudi 22 juillet à soutenir l’économie de la zone euro jusqu’à ce que l’inflation se stabilise durablement à 2 %. La BCE entend maintenir une politique monétaire accommodante, avec des taux bas sur une période prolongée (forward guidance). « Un peu comme la Réserve fédérale (Fed), la BCE va laisser filer et elle va chercher un ancrage durable à 2 % avant de réfléchir à la moindre modification de ses taux », commente Ben Carter, analyste chez Validus Risk Management.

Colombe jusqu’à l’automne

L’institution surveille de près la propagation accélérée du variant Delta — une « source croissante d’incertitude » qui menace désormais la reprise économique au sein de l’Union européenne (UE). « La réouverture de larges pans de l’économie soutient le rebond vigoureux observé dans le secteur des services. Mais le variant Delta du coronavirus pourrait pénaliser l’économie des services, notamment dans le tourisme et dans l’hôtellerie », reconnaît Christine Lagarde, présidente de la BCE. Pour les « colombes » — favorables aux politiques accommodantes — les risques induits par le variant justifient que la BCE maintienne son arsenal anti-crise.

Le programme d’achats d’urgence face à la pandémie (PEPP) n’est pas modifié. La BCE maintiendra l’enveloppe de 1 850 milliards d’euros « au moins jusqu’à fin mars 2022 et, dans tous les cas, jusqu’à ce qu’il juge que la crise du coronavirus est terminée », précise le conseil des gouverneurs. « Il y aura une décision plus tard dans l’année, possiblement au début 2022, ce qui ne manquera pas de susciter une attention particulière lors de la réunion de septembre », estime Ben Carter. « Les programmes d’achats, nous verrons ça à l’automne », confirme François Villeroy de Galhau, gouverneur de la banque de France, ce vendredi 23 juillet sur BFM Business.

Patience et longueur de temps

Pas de quoi toutefois réduire au silence les « faucons », c’est-à-dire les partisans d’un resserrement de la politique monétaire — issus pour la plupart des pays les moins endettés. L’annonce de la BCE s’est traduite par un bref recul de l’euro et des rendements obligataires. Isabel Schnabel, membre allemande du directoire de la BCE, a ainsi récemment déclaré que l’inflation était susceptible de converger vers l’objectif « peut-être plus tôt que certains ne l’imaginent aujourd’hui ». Pour cette année, la BCE prévoit une inflation de 1,9 %. Dans son scénario, les marchés devraient connaître un retour à 1,5% en 2022 et 1,4 % en 2023.

Les gouverneurs partisans de la ligne la plus orthodoxe considèrent que la crise sanitaire commence à s’estomper. D’après leur analyse, la BCE devrait renoncer à ses prérogatives exceptionnelles pour revenir à des politiques plus traditionnelles et ramener l’inflation vers son objectif. Mais la BCE considère aujourd’hui que la hausse de l’inflation n’est que provisoire. La banque centrale n’exclut pas de dépasser provisoirement son objectif de 2 % en raison de la faiblesse des taux. Il y a encore trois conseils de politique monétaire d’ici la fin de l’année, fait remarquer François Villeroy de Galhau ce vendredi. « Ça laisse du temps pour regarder ».

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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