OTAN : la Finlande et la Suède demandent leur adhésion

Actualités - Cette semaine, la Finlande et la Suède ont officiellement présenté leur demande d'adhésion à l'OTAN. Cette démarche historique fait suite à l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Néanmoins, la Turquie s'oppose à ces adhésions. L'élargissement de l'OTAN ira-t-il à son terme ? Comment le conflit rebat-il les cartes stratégiques en Europe ? Le point avec Le Courrier Financier.

OTAN : la Finlande et la Suède demandent leur adhésion

(Conception : Mathilde Hodouin – Réalisation : Amandine Victor)

L’invasion de l’Ukraine par la Russie va-t-elle changer le visage militaire de l’Europe ? La Finlande et la Suède ont formellement transmis ce mercredi 18 mai leur demande d’adhésion à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). La ratification de cette demande d’adhésion par les parlements des 30 pays membres de l’Alliance devrait prendre jusqu’à un an, rapporte l’agence Reuters. « C’est un moment historique que nous devons saisir (…) Vous êtes nos partenaires les plus proches et votre adhésion à l’Otan renforcera notre sécurité commune », a déclaré Jens Stoltenberg, le Secrétaire général de l’OTAN. La demande de la Finlande et de la Suède se heurte toutefois à l’opposition de la Turquie.

Opposition ferme de la Turquie

Ce lundi 16 mai, Ankara a réaffirmé son refus de soutenir une adhésion des deux pays — à la surprise des corps diplomatiques des autres pays membres. « L’expansion de l’Otan n’a de sens pour nous que proportionnellement au respect qui sera témoigné à nos sensibilités », a déclaré le président turc Recep Tayyip Erdogan, devant le parlement de son pays. Le chef de l’Etat accuse notamment la Suède d’héberger sur son territoire des membres d’organisations jugées terroristes par Ankara. La Turquie fait notamment allusion ici aux mouvements kurdes PKK et YPG, mais également aux partisans de l’imam Fethullah Gülen — commanditaire présumé du coup d’Etat manqué de juillet 2016.

Recep Tayyip Erdogan a déploré que les alliés de l’Otan n’aient jamais soutenu la Turquie dans sa lutte contre les groupes militants kurdes — notamment ceux du YPG, dont l’effectif en 2016 était estimé entre 30 000 et 50 000 combattants par Rémy Hémez, chercheur au Laboratoire de Recherche sur la Défense (LRD) de l’Ifri. Ce lundi 16 mai, la chaîne de télévision publique turque TRT Haber a rappelé que ni la Suède, ni la Finlande n’avaient accepté la demande turque d’extrader 33 personnes, accusées de terrorisme par Ankara. « L’OTAN est une organisation pour la sécurité. Par conséquent, nous ne pouvons pas dire ‘oui’ à cette organisation de sécurité en étant privés de sécurité », a martelé Recep Tayyip Erdogan.

Un élargissement compromis ?

L’objection turque risquerait de compromettre l’élargissement de l’OTAN, qui n’est possible qu’à l’unanimité des pays membres. Dans le même temps, les autres Etats ont manifesté leur soutien aux pays scandinaves. L’Allemagne et l’Italie assurent être respectivement favorables à une accélération de ces procédures d’adhésion. « Nous sommes déterminés à surmonter tous les problèmes et à parvenir à des décisions rapides », a tempéré Jens Stoltenberg ce mercredi 18 mai. Les ministres des Affaires étrangères de Finlande, de Suède et de Turquie doivent tenir des pourparlers à Berlin (Allemagne) ce samedi 21 mai, afin de tenter de résoudre les désaccords. D’après un porte-parole turc, il existerait une marge de négociation.

Par ailleurs, les membres de l’OTAN vont examiner les garanties de sécurité pour la Finlande et la Suède en attendant leur adhésion. D’ici là, les deux pays nordiques ne seront pas protégés par l’article 5 de l’Alliance — selon lequel tous les membres sont solidaires en cas d’attaque contre un allié. L’OTAN prévoit désormais d’évaluer la situation militaire sur le terrain, au regard du soutien de la Suède et de la Finlande à l’armée ukrainienne. Ce projet suscite déjà des menaces de représailles de la part Moscou. D’ici fin juin 2022, l’OTAN devrait procéder à une refonte de son concept stratégique — c’est-à-dire sa doctrine militaire de base. Le conflit en Ukraine a donc déjà définitivement rebattu les cartes géopolitiques en Europe.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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