France : les marchés s’inquiètent d’une victoire de Marine Le Pen à la présidentielle

Actualités - Avec l'élection présidentielle 2022 en France, le risque politique fait son retour en bourse. Comment la possibilité d'une victoire de Marine Le Pen affecte-elle les marchés financiers ? Comment les investisseurs s'adaptent-ils ? Le point avec Le Courrier Financier.

France : le risque de victoire de Marine Le Pen à la Présidentielle inquiète les marchés

(Conception : Mathilde Hodouin – Réalisation : Amandine Victor)

Le premier tour de la présidentielle se tiendra ce dimanche 10 avril. Quelques jours avant l’échéance, le risque politique fait son retour sur les marchés financiers européens en cas de victoire de Marine Le Pen. D’après le Baromètre Opinionway – Kéa Partners pour Les Echos mis à jour ce jeudi 7 avril, la candidate du Rassemblement National (RN) arrive deuxième dans les intentions de vote au premier tour (22 %) derrière le président sortant (26 %). Au second tour, Marine Le Pen est crédité de 47 % des voix au second tour face à Emmanuel Macron (53 %). Si la candidate d’extrême-droite est donnée perdante dans la course à l’Elysée, sa bonne dynamique récente suffit à inquiéter.

France : les marchés s'inquiètent d'une victoire de Marine Le Pen à la présidentielle
Source : Baromètre Opinionway – Kéa Partners –
Election présidentielle 2022 mise à jour 07/04/2022
France : les marchés s'inquiètent d'une victoire de Marine Le Pen à la présidentielle
Source : Baromètre Opinionway – Kéa Partners –
Election présidentielle 2022 — mise à jour 07/04/2022

Le risque Le Pen sur les marchés

Le phénomène touche aussi bien la dette souveraine, que les devises ou encore le CAC40. Ce mardi 5 avril, l’indice CAC 40 a terminé la séance en repli de -1,28 % contre une hausse de +0,19 % pour l’indice paneuropéen Stoxx 600. Ce mercredi 6 avril, le spread entre le taux de l’OAT (10 ans français) et celui du Bund (10 ans allemand) atteignait 0,55 % — un niveau inédit depuis le krach boursier lié à la pandémie de Covid-19 en 2020. « Les marchés se sont réveillés sur Le Pen », commente Jérôme Legras, responsable de la recherche chez Axiom Alternative Investments. En France, les ventes sont visibles sur les actions considérées comme les plus exposées à une victoire de Marine Le Pen.

Ce mardi 5 avril, Vinci (-4,09 %) et Eiffage (-4,19 %) ont fini en repli. « Leur sous-performance est liée au risque Le Pen », a commenté un Broker pour Reuters, en référence aux projets de la dirigeante d’extrême droite d’une nationalisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes. Le même jour, les actions des banques françaises Société Générale, BNP Paribas et Crédit Agricole ont chuté entre -4 % et -6 % en séance. Dans le même temps, l’indice bancaire en Europe ne reculait que de -1,3 %. Ce jeudi 7 avril, Marine Le Pen s’est moquée de ce catastrophisme au micro de RTL. « La politique que je souhaite mettre en place n’est pas tellement pour les boursiers, contrairement à [celle d’] Emmanuel Macron », dit-elle.

Quelles probabilités de victoire ?

La candidate RN défend la solidité de son programme économique. « Le projet que je présente est un projet sérieux, qui soutient les entreprises, les TPE-PME, qui rend leur argent aux Français (…) Je ne remettrai pas l’avenir du pays entre les mains de la finance internationale », martèle Marine Le Pen. La candidate prévoit la création d’un fonds souverain français, qui permettrait selon elle d’investir 100 milliards d’euros par an dans l’économie réelle. « Ce ne sont pas eux [les investisseurs étrangers, NDLR] qui créent des emplois ce sont les chefs d’entreprise », assure-t-elle. Son programme serait notamment financé par « la lutte contre la fraude fiscale [et] la lutte contre l’immigration clandestine qui coûte très cher à notre pays ».

De nombreux investisseurs jugent onéreux le programme de Marine Le Pen en termes de dépenses publiques (maintien de la retraite à 62 ans) et moins favorable aux entreprises. Avant l’élection présidentielle de 2017, les craintes d’une victoire de l’extrême droite ou de l’extrême gauche avaient déjà fait grimper les coûts d’emprunt de l’Etat français et chuter les marchés d’actions. « Une victoire de Le Pen est le joker qui pourrait être perturbateur. Mais le scénario de base est toujours en faveur d’Emmanuel Macron », estime Grace Peters, responsable de la stratégie d’investissement EMEA chez JP Morgan Private Bank. L’investisseur continue de miser sur les actions françaises — luxe et énergie en tête.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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