Fiscalité du capital : le ruissellement ne fonctionne pas, selon France Stratégie

Actualités - Cette semaine, France Stratégie publie son troisième rapport d'évaluation sur les réformes de la fiscalité du capital, entreprises sous le quinquennat d'Emmanuel Macron. Quel a été l'impact de la suppression de l'ISF ? Les dividendes en hausse ont-ils été réinjectés dans l'économie réelle ? Le point avec Le Courrier Financier.

Fiscalité du capital : le ruissellement ne fonctionne pas, selon France Stratégie

(Conception : Mathilde Hodouin – Réalisation : Amandine Victor)

Le ruissellement promis n’a pas eu lieu. Ce jeudi 14 octobre, France Stratégie — organisme rattaché à Matignon — a publié son troisième rapport d’évaluation sur les réformes fiscales entreprises par Emmanuel Macron. En 2017, le Président tout juste élu initiait le remplacement l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) ; et la création d’un prélèvement forfaitaire unique (dite aussi « flat tax ») de 30 % sur les revenus du capital, à la place d’une imposition au barème progressif. Le rapport passe aussi au crible la baisse de l’impôt sur les sociétés (IS), avec un taux nominal de 25 %, prévue pour 2022.

Les contribuables reviennent…

Depuis le passage à l’IFI, France Stratégie observe « une baisse du nombre d’expatriations et une hausse du nombre d’impatriations fiscales de ménages français fortunés, si bien qu’en 2018 et 2019, le nombre de retours de foyers taxables à l’IFI dépasse le nombre de départs ». Ils étaient 340 en 2018, contre 280 en 2019. Pour le comité d’évaluation, il s’agit d’un épiphénomène à l’échelle des 130 000 contribuables assujettis à l’IFI en 2019. En revanche, la suppression de l’ISF ne semble pas avoir affecté la distribution de dividendes ni la gouvernance des entreprises. Le comité, présidé par Fabrice Lenglart, invite toutefois à la prudence.

Dans le même temps, le versement de dividendes opère son grand retour. Sur la période 2013-2017, les versements de dividendes étaient en recul. Ils reviennent à leur niveau de 2013 et leur intégration dans le calcul de l’impôt sur le revenu (IR) — soit environ +9 milliards d’euros. Cette hausse des dividendes a permis de remplir les caisses de l’administration fiscale, ramenant le coût de la réforme à environ 1,5 milliard d’euros, contre un coût prévisionnel de 5 milliards d’euros. Sur les grandes variables économiques — croissance, investissement, flux de placements financiers des ménages, etc. — l’effet semble moins évident.

…les investissements, pas vraiment

C’est particulièrement vrai concernant le ré-investissement des dividendes reçus dans l’économie réelle. « Qu’ont fait ces foyers de cet argent ? Ont-ils réinvesti dans les entreprises du tissu productif français ? » s’interroge Cédric Audenis, commissaire général adjoint à France Stratégie. « Aucun effet n’est identifié sur l’investissement, ni après 2013 (réforme de l’imposition des dividendes), ni après la réforme de 2018 », ajoute-il. Les entreprises ont certes distribué plus de dividendes, mais sans que ce mouvement ne se fasse sentir « sur l’investissement ou la masse salariale ». Question de temps ? « On manque encore de recul », tempère Bercy.

Mathilde Hodouin - Le Courrier Financier

Rédactrice en chef (janvier 2019 - février 2024)

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