Taux, actions, devises… un climat favorable ?

Asset Management - Quelles-sont les perspectives financières pour le mois à venir ? Sur les marchés obligataires, la dette souveraine française est soulagée tandis que sur les marchés d'actions il semblerait qu'un climat positif généralisé s'installe. Toutefois, gare aux excès de confiance : les aléas politiques mènent la danse.

Taux d’intérêt/Marchés obligataires : soulagement pour la dette souveraine française

Aux Etats-Unis, l’inflation totale aurait passé son pic cyclique au premier trimestre. Pourtant, sa vérification semble avoir surpris les marchés, notamment parce que l’inflation sous-jacente est retombée à 2,0%, contre 2,3% en janvier. Il semblerait que le pari des marchés sur la relance de l’activité consécutif à la victoire électorale de Donald Trump soit allé trop loin face aux réalités économiques et politiques. Entre-temps, les conditions financières de l’économie des Etats-Unis ne se sont pas resserrées depuis le relèvement des taux de la Réserve fédérale en mars. La Fed pourrait se permettre encore deux hausses de taux cette année pour tenter de regagner une certaine marge de manœuvre sans porter sérieusement préjudice à l’activité.

En Europe, le risque de victoire des partis politiques populistes a diminué après l’élection présidentielle française, suite auquel les écarts de rendement obligataires ont évolué en faveur de la France. En parallèle, les rendements des valeurs refuges comme celles de l’Allemagne ou de la Suisse ont augmenté graduellement et devraient continuer dans ce sens jusqu’à fin 2017. Cependant, que les rendements obligataires nominaux resteront bridés par les instruments de répression financière employés par les banques centrales et par les autorités financières. En Europe, le programme d’achat d’obligations de la BCE assure des conditions de refinancement favorables à l’Italie, où des élections législatives sont prévues pour mai 2018. Ainsi, lorsque les élections françaises seront de l’histoire ancienne, les marchés s’intéresseront à la situation italienne.

Marchés d’actions : climat positif généralisé ?

La hausse des marchés d’actions s’est encore accélérée au mois d’avril. Les principaux marchés ont en commun une excellente saison de résultats pour le premier trimestre de cette année, qui justifie la tendance positive des cours. Les bonnes surprises sont indéniablement majoritaires parmi les deux tiers des entreprises du S&P500 qui ont déjà publié leurs trimestriels. Les entreprises américaines devaient voir leurs résultats croître de 5% par rapport au premier trimestre 2016, elles affichent finalement une progression de 10% à ce jour.

Sur les marchés européens, la bonne surprise était encore plus marquée, avec une croissance des résultats publiée de presque 20% sur un an. Dans le même temps, les révisions à la hausse des prévisions sont devenues elles aussi monnaie courante. Dans une certaine mesure, revoir les estimations de résultats à la hausse peut rendre les valorisations plus attrayantes. Ce n’est pas tout à fait vrai cependant. Les valorisations sont élevées en valeur absolue. Après huit ans de hausse des cours, les actions sont chères même si elles offrent toujours une prime de risque intéressante par rapport aux autres catégories d’actifs.

Toutefois, la volatilité (tant implicite qu’effective) extrêmement basse incite à la prudence. Les investisseurs acquièrent des options d’achat depuis plusieurs semaines, mais s’intéressent rarement aux options de vente. L’optimisme règne et les investisseurs du monde entier semblent ignorer les facteurs politiques et économiques susceptibles d’avoir des conséquences défavorables. Un tel excès de confiance nous rend circonspects pour les perspectives des marchés d’actions à court terme. Les indicateurs de sentiment reflètent un degré d’optimisme économique que les statistiques conjoncturelles effectives ne peuvent pas suivre, en particulier aux Etats-Unis. Il est difficile d’imaginer d’où pourrait provenir un regain de dynamisme pour les actions à l’heure actuelle.

Devises : la politique aux commandes

L’élection présidentielle française montre une fois encore à quel point les préoccupations quant à la cohésion de la zone euro influent sur la valeur du franc suisse. En janvier, lorsque le scandale autour de François Fillon a éclaté, l’euro a commencé à se déprécier, induisant une pression haussière accrue sur le franc suisse. La Banque nationale suisse (BNS) était alors intervenue massivement pour éviter une chute du taux de change EUR/CHF à 1,06. Dès l’annonce des résultats du premier tour du scrutin présidentiel français, l’euro s’est apprécié de 2% environ, tiré par le fort recul de la probabilité d’une victoire de Marine Le Pen. En conséquence, l’EUR/CHF est passé de moins de 1,07 à environ 1,085 la semaine suivant ce premier tour.

La livre sterling s’est révélée elle aussi très influencée par la politique ces dernières semaines. La décision de Theresa May de convoquer des élections anticipées a été saluée par les marchés. Le Premier ministre britannique devrait ainsi s’assurer une vaste majorité au parlement, qui renforcera sa position dans les négociations avec l’UE.

Outre-Atlantique, les événements politiques n’étaient pas de nature à enthousiasmer les investisseurs, et on ignore encore dans quelle mesure la nouvelle administration américaine pourra tenir ses promesses. La politique monétaire continuera de jouer un grand rôle à l’avenir. Le dollar dispose encore d’une marge de progression grâce au cycle de resserrement de la Réserve fédérale tandis que les autres grandes banques centrales restent accommodantes. Pourtant, avec un euro soutenu par l’amélioration de la conjoncture et la dissipation des risques politiques, le dollar peinera à progresser face à la monnaie unique européenne.

 

 

 

Claudia Bernasconi - SwissLife AM

Économiste spécialiste des marchés émergents chez SwissLife AM

Voir tous les articles de Claudia