Réformes économiques en Inde : le pays en plein bouleversement

Asset Management - L'économie indienne devrait continuer à ressentir pendant l'année à venir les perturbations de court terme liées à la série de réformes implémentées dans le pays ces 12 derniers mois. Qui plus est, les élections locales à venir devraient entrainer un regain de volatilité sur les marchés. Mais la patience devrait cependant se trouver récompenser dans la mesure où ces réformes vont soutenir l'économie indienne à long terme.

Les perturbations entraînées par la série de réformes économiques introduites ces 12 derniers mois par le gouvernement de Narendra Modi devraient continuer de se faire ressentir dans l’économie pendant au moins la première moitié de l’année. Qu’il s’agisse de la démonétisation, ou le retrait de la circulation des grosses coupures, de l’introduction d’une taxe nationale sur les biens et services ou encore de la recapitalisation de 32 milliards de livres sterling des banques du secteur public, l’économie indienne va avoir besoin de temps pour s’adapter.

Même si nous sommes persuadés que ces réformes seront positives pour l’économie à long terme, à court terme s’adapter à la taxe sur les biens et services nous semble être le plus gros défi auquel le pays doit faire face. Les chaînes d’approvisionnement et de distribution ont été perturbées et les entreprises restent dans l’incertitude quant à leurs perspectives à court terme ; nous l’avons constaté par nous-mêmes pendant notre dernière visite en Inde, lors de laquelle bon nombre des entreprises que nous avons rencontrées nous ont alertés sur le fait que leurs résultats sur le dernier semestre avaient été particulièrement imprévisibles à cause des bouleversements entraînés par l’introduction de cette taxe.

Sur le long terme, la taxe sur les biens et services sera très bénéfique pour l’Inde.

Par exemple, une grande partie de l’activité devrait quitter le secteur informel au profit des entreprises qui sont déjà en conformité du point de vue fiscal, avec en plus le bénéfice pour le gouvernement d’une augmentation des recettes fiscales. La logistique devrait aussi gagner en efficacité, étant donné que les taxes n’auront plus à être payées sur les biens passant d’un Etat à l’autre, ce qui éliminera aussi la nécessité de contrôle aux postes frontières. Si les entreprises peuvent trouver quelques bénéfices à réduire leurs coûts logistiques, nous pensons que la majeure partie des économies réalisées sera répercutée au niveau des consommateurs, ce qui devrait réduire l’inflation.

En résumé, même si l’implémentation de ces réformes a engendré un climat d’incertitude à court terme, cela a aussi renforcé notre thèse principale : la modernisation et les réformes de l’administration de Narendra Modi aident à bâtir les fondations d’une croissance forte pour le pays sur le long terme.  Dans la dernière publication de l’étude de la Banque Mondiale sur climat des affaires, l’Inde a gagné 30 places pour se classer au 100ème rang mondial – et cela ne prend pas encore en compte la mise en place de cette taxe sur les biens et services.

Pour ajouter à l’incertitude, un certain nombre d’élections doivent se tenir au niveau local dans les 18 mois à venir, ce qui pourrait se traduire par un supplément de volatilité sur les marchés. Environ 24% des sièges de la Lok Sabha (la chambre basse du Parlement), et 23% des sièges de la Rajya Sabha (la chambre haute) sont occupés par des Etats dans lesquels vont prochainement se tenir des élections, y compris au Gujarat, l’état de Narendra Modi. Une large victoire à ces élections serait un bon présage pour les élections générales de 2019 ; nous pensons que la réélection de Modi est le scénario le plus vraisemblable, ce qui lui laisserait le champ libre pour davantage de réformes.

Selon nous, les résultats des entreprises seront meilleurs qu’escomptés par les analystes car nous avons identifié plusieurs moteurs de rentabilité à long terme et qui sont encore sous-valorisés par le marché : la taxe sur les biens et services, la mise en place du versement direct des subventions, l’augmentation de l’accès à l’Internet à haut-débit et l’inclusion financière (notamment l’introduction de l’India Stack, une plateforme logicielle complète gérée par le gouvernement qui combine l’infrastructure de l’identification biométrique, casiers numériques, e-signatures et paiements numériques). Nous pensons que les entreprises liées à la consommation domestique, comme les distributeurs de carburant, les sociétés de gestion d’actifs ou les compagnies aériennes locales ont le plus a gagné de ces moteurs de performances.

Ce qui est plus difficile à prédire, c’est le risque lié à la survenance de chocs exogènes sur les marchés mondiaux. Investir en Inde, comme sur n’importe quel marché, revient avant tout à choisir des entreprises à même de fonctionner et croître quelles que soient les conditions économiques et politiques.

Avinash Vazirani - Jupiter AM

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