Une grande vigueur règne du côté des sociétés

Asset Management - Les investisseurs américains avaient pu l’oublier au cours des derniers trimestres : les marchés ne montent pas en permanence, de manière linéaire. Le mois de février leur a donné un petit rappel de la notion de volatilité, et d’imprévisibilité : si le salaire horaire médian, la statistique qui a déclenché la correction de février, n’est généralement que peu observé, il a donné l’occasion aux craintes inflationnistes de se cristalliser, le tout sur un fond de très belle santé financière des entreprises cotées partout dans le monde.

Alors que l’effondrement du cours des matières premières avait éteint les velléités inflationnistes des investisseurs entre 2014 et 2016, un redressement de la conjoncture mondiale et un rebond des matières premières font désormais anticiper au consensus une résurgence inflationniste. Une poussée cyclique de l’inflation semble en cours, du moins aux Etats-Unis, les anticipations d’inflation étant fortement remontées pour se rapprocher de leurs valeurs moyennes historiques. Qu’attendre désormais ? Le constat est simple, le potentiel haussier du point mort d’inflation a bien diminué : le point mort américain à 10 ans, qui a passé une grande partie de l’année 2017 autour de 1,80%1 se situe désormais à 2,10%1 contre une valeur historique moyenne se situant entre 2% et 2,50%.

Si des variables cycliques ont poussé les niveaux d’inflation plus hauts, la situation structurelle a plutôt empiré du point de vue monétariste, à la Milton Friedman : si l’on considère comme lui que l’inflation est toujours et partout un phénomène monétaire, les derniers chiffres de croissance de la masse monétaire M2 aux Etats-Unis (4,2%1 en janvier dernier, soit le plus bas niveau depuis décembre 2010) et en Chine (8,6%, proche du plus bas historique atteint en décembre), pointent vers un risque de retournement conjoncturel dans les trimestres à venir, qui affecterait à la fois l’inflation et la croissance plutôt qu’à un retour à des valeurs proches des standards des années 1990. Le point de vue monétariste n’étant qu’un point de vue parmi d’autres, on peut aussi regarder ce qui se passe sur le terrain, du côté des sociétés. Et là, c’est une grande vigueur qui règne.

La publication des résultats n’est qu’à mi-parcours en Europe mais touche à sa fin au Japon et aux Etats-Unis et brosse le tableau d’un excellent dernier trimestre 2017, toutes régions confondues. Les secteurs cycliques se sont mieux portés que les secteurs défensifs, confirmant la consolidation de l’activité économique mondiale. Globalement, les bénéfices en 2017 sont en hausse de 15% à 35% selon les régions, alors que la croissance des chiffres d’affaires est de l’ordre de 8%, témoignant ainsi d’une expansion considérable des marges des entreprises. Aux Etats-Unis, 78% des sociétés ont surpris positivement. Tous les secteurs sont en progression, la hausse étant de 15% pour les bénéfices et de 7,9% pour les chiffres d’affaires. Les meilleurs chiffres proviennent des secteurs des matériaux de base, de la technologie et de l’énergie. Au Japon, 62% des sociétés ont battu les attentes, avec des bénéfices en hausse de 33,5%, alors que les ventes progressent de 7,9%.

En Europe, 54% des sociétés ont affiché de meilleurs bénéfices qu’attendus, mais un tiers des publications reste encore à venir. Les surprises positives sont en provenance des secteurs des biens de consommation, des matériaux et de l’énergie alors que les déceptions se situent parmi les financières, les valeurs industrielles et les télécoms. Les bénéfices progressent de 35%, en forte hausse pour les financières, l’énergie et les matériaux. Deux secteurs voient leurs bénéfices chuter : la santé et les télécommunications.

Bernard Aybran

Directeur de la multigestion - Invesco Asset Management

Voir tous les articles de Bernard